Arisitum
(Côte-d'Or, Niévre, Saône-et-Loire, Yonne)
Source: "Bilan Scientifique 1992", Ministère de la Culture et de la Communication, Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bourgogne, Service Régional de l'Archéologie, 1993, pages 9 à 12.
Bilan et orientations de la recherche archéologique (de Claude MORDANT, Conservateur Régional)
Moyens et équipes mises en oeuvre
Le bilan 1991 mettait en lumière une situation contrastée avec un déficit des moyens consacrés à la Pré-Protohistoire par rapport à ceux consacrés à l'archéologie historique urbaine ou rurale. La situation en 1992 est comparable mais il faut noter en plus le glissement des travaux de l'autoroute A5 vers la Champagne (Vanne et plaine de Troyes) et la fin de cette opération pourvoyeuse de quelques grands chantiers en ce domaine (gisements paléolithiques, minières néolithiques, nécropoles protohistoriques du Sénonais).
Cette tendance doit être redressée car elle pourrait conduire à terme à un amoindrissement des recherches et du nombre des spécialistes pour cette période malgré un potentiel considérable. La mise en oeuvre d'une relance supposera un partenariat fort avec les collectivités territoriales, les universités, le C.N.R.S.
Le renforcement des P.C.R. "Alimentation carnée au Paléolithique moyen" ou sur le "Néolithique", la reprise des recherches à Arcy-sur-Cure, la création de l'U.M.R. 99-34 "Le premier millénaire avant J.-C. en Bourgogne", la bonne marche du programme "Alésia" peuvent aider à la mise en oeuvre d'un nouveau dynamisme. L'influence régionale d'une structure comme le Mont-Beuvray doit s'amplifier.
La période gallo-romaine, bien documentée par de longues années de recherches, doit faire l'objet de synthèses d'ampleur ; la publication globale des agglomérations secondaires gallo-romaines coordonnée par J. Bénard en constitue un bon exemple. En médiéval, le dynamisme de C. Sapin et des chercheurs, (étudiants pour la plupart) regroupés autour de lui et de son unité de recherche, a permis le démarrage de projets ambitieux sur les abbayes d'Auxerre, de Cluny, de La Charité-sur-Loire. C'est assurément un point fort de la recherche régionale.
En dépit d'un potentiel exceptionnel (nombreux sites de référence de niveau national ou international), la Bourgogne souffre d'un défaut de chercheurs et de structures de recherches (à l'instar du "Grand Est" de la France). Dans un tel contexte, tous les partenaires de l'Archéologie régionale et l'Université en particulier doivent renforcer et coordonner leurs efforts.
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Bilan par période
Préhistoire
1992 a donc vu l'achèvement des dernières fouilles de sauvetage sur l'autoroute A5 (Lailly. Beauregard), avec comme principal effet pervers le départ de plusieurs contractuels spécialisés en Paléolithique vers d'autres régions. La fouille du gisement paléolithique moyen de Champlost s'est aussi achevée; son étude approfondie demandera encore plusieurs années à l'équipe de C. Farizy. L'interruption des recherches rend cependant cruciale la nécessité de protéger le site des labours trop profonds.
A Arcy-sur-Cure se sont poursuivis les travaux de relevé des peintures rupestres, dont il convient de régler rapidement les problèmes de protection.
L'investissement important de nombreux chercheurs bourguignons dans le Colloque néolithique de Dijon en 1991, s'est traduit l'année suivante par un relatif essoufflement des recherches. Le Projet collectif sur les Danubiens se poursuit cependant, regroupant des chercheurs de divers horizons sur des travaux variés. Cette réflexion est alimentée par quelques fouilles de sauvetage provoquées par le constant développement des gravières de la vallée de l'Yonne. De nombreuses prospections sont poursuivies, tant pour le paléolithique que le Néolithique, complétées par quelques sondages d'évaluation.
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Protohistoire
Deux fouilles seulement ont directement concerné l'Age du Bronze : Malain et Gurgy, complétées par quelques découvertes ou indices sporadiques. Cette période reste encore largement sous-exploitée.
L'Age du Fer fait par contre l'objet de nombreuses recherches dont certaines se poursuivent depuis plusieurs années (Mont-Beuvray, Vix et Vertault) avec des résultats souvent intéressants que l'on trouvera décrits plus loin.
D'autres découvertes sont plus inattendues : sépulture hallstattienne dans un tertre supposé néolithique à Marcilly-Ogny, trésor de monnaies d'or à Saint-Denis-les-Sens, habitat gaulois à Alésia. Les réunions préparatoires à la création de l'U.M.R. 9934 ont favorisé la rencontre des divers chercheurs et la confrontation de leurs travaux.
Histoire
Les travaux portant sur l'époque gallo-romaine restent abondants, nourris par un abondant patrimoine et une forte communauté scientifique. Ils sont largement dynamisés par les quelques opérations d'envergure que l'on trouvera décrites plus loin : fortifications du siège d'Alésia, fouilles urbaines sur de vastes surfaces à Autun, Dijon ou Auxerre.
Des opérations de sauvetage plus limitées livrent également de précieux résultats ; c'est le cas du fanum de Ménestreau, ou, plus inattendu, des ateliers de potiers romains de Nevers.
Les recherches médiévales font l'objet d'un regain constant d'intérêt, qu'il s'agisse, bien sûr, des grosses opérations de Cluny, Auxerre ou La Charité-sur-Loire, mais aussi de prospections ou de recherches thématiques coordonnées autour de quelques axes privilégiés : mottes féodales, céramique, métallurgie, etc. Les sauvetages de plus en plus fréquents liés à des travaux sur les Monuments Historiques jouent un rôle non négligeable dans cette augmentation des recherches médiévales. La région devient peu à peu irriguée par un réseau bien équilibré de chercheurs et de pôles d'activités qui facilite ce développement.
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Prospection-Inventaire, carte archéologique
Le travail régulier d'une dizaine de chercheurs continu d'alimenter la carte archéologique de la Bourgogne. A côté des recherches d'archéologie aérienne, toujours présentes, et malgré tout peu gênées par la forte pluviosité de 1992, se développent un certain nombre d'opérations de prospection au sol (Nièvre, Saône-et-Loire, etc.) et même souterraines en milieu urbain (Tonnerre). Les résultats issus de ces différentes prospections sont variés dans leur forme et nécessitent souvent un travail complexe de normalisation pour être à la fois directement exploitables sur le système informatique du Service et archivés dans les meilleures conditions. Un effort significatif dans ce sens sera demandé aux chercheurs concernés au cours des prochaines années.
Quatre contractuels ont oeuvré en 1992 au sein de la cellule "carte archéologique", réduisant considérablement le retard existant dans le traitement et l'archivage de la documentation issue des travaux des années précédentes. Un long travail reste cependant à faire pour vérifier et contrôler l'information, harmoniser son archivage et sa gestion et surtout permettre une consultation aisée de la base de données.
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Colloques, animations
C'est le département de la Nièvre qui a accueilli à Clamecy, les 23-24 mai les Journées Archéologiques régionales, dont une partie du contenu était consacré au thème des sanctuaires. Une délégation de préhistoriens britanniques, membres de la British Society, ont parcouru, dans la journée du 20 septembre, quelques sites bourguignons, dans le cadre d'un échange organisé par la Société Préhistorique Française. Enfin, les 5 et 6 novembre s'est tenu à Dijon un colloque international sur les Burgondes, réunissant un nombre significatif de chercheurs européens.
Par ailleurs, au cours de l'année et avec la participation du Service et de plusieurs chercheurs bourguignons, s'est poursuivi l'examen attentif du projet de redéploiement de l'Archéodrome (conseil scientifique).
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Perpectives 1993
La programmation 1993 ne propose pas de solution miracle à la situation régionale qu'il faudra gérer sur le long terme. La mise en oeuvre du contrat de plan Etat-Région 1994-1998 doit favoriser le montage de quelques projets.
Pour le Paléolithique, la réactualisation des projets d'aménagements sur Solutré, l'ouverture d'un programme de prospection et de diagnostic sur des sites clés du Paléolithique moyen de Saône-et-Loire, le maintien résolu des recherches à Arcy et la préparation d'un colloque international sur la fréquentation des sanctuaires paléolithiques (1995) doivent relancer et favoriser les collaborations entre chercheurs.
Pour le Néolithique et la Protohistoire, il sera essentiel de mener à son terme les publications sur les minières de l'A5, celle des Actes du colloque interrégional sur le Néolithique de Dijon et des fouilles de Chassey mais aussi de poursuivre les travaux d'inventaire des sites remarquables et menacés de l'Yonne ou de la vallée de la Saône. Le programme d'inventaire sur les mégalithes de Saône-et-Loire est parvenu à son terme, il conviendra de l'étendre aux autres départements (l'Yonne étant déjà entamée).
De nombreux ensembles funéraires du Bronze final de ces mêmes secteurs devront être étudiés avant de relancer les indispensables recherches de terrain. La fin de la fouille d'un enclos à Vix, une table ronde à l'automne 1993 sur les résidences princières du Hallstatt final devraient attirer l'attention sur ce site, 40 années après la découverte de la célèbre tombe princière par R. Joffroy.
Un programme tri-annuel s'ouvrira sur le Mont-Beuvray, l'accent est mis sur la voirie, l'urbanisation, la gestion de l'eau... le sauvetage de la nécropole du Col du Rebout sera achevé. Ces ensembles clos de référence, essentiels pour la fin de l'Indépendance et le début de la romanisation en gaule feront l'objet d'une présentation synthétique à l'automne. A Alésia, les recherches sur les fortifications du siège de César se poursuivront sur l'oppidum, à proximité de la "Maison Jouarre", l'étude portera sur les habitats gaulois mis au jour lors du diagnostic de 1992 ; c'est la première fois depuis un siècle que l'opportunité d'une étude de ces structures est offerte. Une table ronde internationale sur les fortifications césariennes est programmée en Septembre 1993.
Le programme d'étude du sanctuaire de Vertault sera ralenti mais la fouille des monuments funéraires gallo-romains de Nod-sur-Seine se poursuivra.
Les prospections thématiques sur la métallurgie antique et médiévale suivront leur cours tout comme les prospections thématiques sur l'occupation antique du canton de Pierre-de-Bresse, des sites fortifiés médiévaux de la Nièvre, les recherches sur le terroir médiéval de Saint-Romain, le P.C.R. sur la céramique médiévale. Grâce au dynamisme de L. Bonnamour, les recherches subaquatiques sur un programme de recherches et de prospections-diagnostics se maintiendront sur les gués de la Saône en Chalonnais.
Le renouvellement des opérations programmées (8 nouvelles demandes sur 27) reste mesuré malgré cette ouverture car ces demandes intéressent toujours les même programmes et secteurs géographiques, elles sont faites par des collaborateurs affirmés du Service et les budgets sont des plus modestes (7000 à 25.000 F). Les moyens consacrés à la prospection-inventaire et à la carte archéologique seront maintenus au niveau actuel encore trop modeste et les grandes opérations de sauvetage prévues en 1993 semblent rares à ce jour en dehors de la poursuite du sauvetage d'Autun. Remarquons cependant la poursuite d'interventions majeures en relation avec les Monuments Historiques dans les grandes abbayes de Bourgogne : programmation de la fouille du grand transept de Cluny, travaux sur les cryptes et le cloître à Saint-Germain d'Auxerre, opérations de diagnostic sur l'église Saint-Laurent de La Charité-sur-Loire. II devient enfin de la plus extrême urgence de jeter les bases d'un accord contractuel pour les sauvetages programmées en gravières, dans l'Yonne en particulier.
Résultats scientifiques significatifs
Préhistoire
Les travaux sur le site moustérien de plein air de Champlost (Yonne) se sont achevés cette année; cette dernière campagne avait pour but de circonscrire le gisement et de préciser les diverses profondeurs d'apparition de la couche archéologique qui reste très superficielle, et donc menacée.
Les recherches systématiques entreprises à Arcy-sur-Cure {Yonne) dans la "Grande Grotte" se sont poursuivies et sont à l'origine de la découverte de nouvelles peintures du Paléolithique supérieur. A ce jour, ce sanctuaire exceptionnel pour les régions septentrionales regroupe: 14 mammouths, un rhinocéros, 2 ours, 4 cervidés, 2 bovidés, un bouquetin, un cheval ainsi que 6 mains négatives, une positive, une vulve et quelques signes. De nouvelles investigations ont confirmé la préservation de niveaux de fréquentation avec petit foyer d'éclairage, charbons de bois et petits blocs d'ocre. L'ensemble des figurations se rapporte au "style III" de Leroi-Gourhan.
La grotte du Diable à Malain (Côte-d'Or) renferme des niveaux intéressants avec foyers du Bronze moyen et final.
Sur le site d'habitat de Gurgy "La Raie Bossue" (Yonne), des fosses domestiques ont livré une céramique abondante de la phase moyenne du Bronze final (Rhin-Suisse-France orientale). Les ensembles domestiques de référence sont encore rares pour cette période dans l'Yonne.
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Histoire
La poursuite de la fouille de l'enclos quadrangulaire (cultuel ?) de Vix "Les Herbues" a permis de replacer dans un contexte chronostratigraphique de la première moitié du Vo siècle avant J.-C. les 2 statues humaines découvertes en 1991. Cette proposition s'appuie sur la découverte dans le remplissage du fossé de fibules à timbale du Hallstatt final. Le reste du mobilier découvert dans le fossé est assez banal : céramique domestique et faune fragmentée, quelques os humains erratiques.
Les sauvetages et prospections sur le plateau calcaire de Marcilly-Ogny (Côte-d'Or) sont à l'origine du dégagement d'un tertre funéraire avec inhumations hallstattiennes.
Pour la période de La Tène finale et du début de la romanisation, les découvertes sont nombreuses et d'importance. Sur le tracé de l'autoroute A 160, à Saint-Denis-les-Sens (Yonne), un trésor de 242 monnaies d'or du type "globulaire à la croix" (sénones ?) a été recueilli dans le comblement d'un trou de poteau d'une maison quadrangulaire installée dans l'enclos d'une ferme "indigène". De nouvelles fosses à sacrifice avec dépôts de chiens ont été mises au jour dans le sanctuaire celtique de Vertault "Derrière la Cure" (Côte-d'Or).
Au Beuvray, en plus de la poursuite des recherches sur l'oppidum, le sauvetage au col du Rebout lié aux travaux d'aménagement du musée est à l'origine de la découverte d'une nécropole à incinération avec petits enclos quadrangulaires datable de l'extrême fin de l'Indépendance et du début de la Romanisation.
A Alésia (Alise-Sainte-Reine. Côte-d'Or), la contrevallation césarienne dans la Plaine des Laumes comporte 3 fossés associés à un système dense de trous de loup, modèle attesté en plusieurs points de la circonvallation.
Le système de fortifications apparaît bien plus complexe que les études du XIXè siècle ne le laissaient prévoir: la nomenclature des camps semble en particulier à revoir (camp I non césarien). Sur le plateau d'Alise, le murus gallicus très dégradé a été repéré au lieudit "La Croix St-Charles" et à "En Curiot", des niveaux stratifiés gaulois scellés en partie par une voie antique ont été repérés.
Pour la période gallo-romaine, il faut insister sur l'exceptionnelle fouille extensive à Autun (Saône-et-Loire), d'un îlot urbain contigu au rempart, occupé du 1er au IIIè siècle avec ateliers de bronziers, forgerons, potiers. A Auxerre "Vaulabelle" (Yonne), la poursuite du sauvetage sur un quartier de la ville gallo-romaine a entraîné la découverte d'un trésor monétaire du IIIè siècle et de fragments de statuaire d'excellente qualité (un Mercure en particulier). Quelques fours pour céramique fine (1er siècle) ont été dégagés à Nevers (Nièvre).
Le fanum de Ménestreau (Nièvre), a livré de nouveaux éléments de statuaires, des blocs d'architecture ainsi qu'une coquille Saint-Jacques en argent dédiée à une divinité inconnue "GRINOVANTI". Les fouilles préalables à la construction du parking souterrain Sainte-Anne de Dijon {Côte-d'Or) ont permis la mise au jour à l'extérieur de l'agglomération gallo-romaine d'un grand fossé (défensif ?) et d'un système de voies, d'une zone cultuelle (?) avec fosses à offrandes, sépultures humaines et d'animaux (chiens, ovicapridés). Une villa lui succède et des activités artisanales se développent au cours du IIè siècle. Cette dernière période voit le changement radical de l'orientation de la voirie initialement Est-Ouest vers un axe Nord-Sud; ce fait est mis en relation avec la création du castrum.
Pour les périodes médiévale et moderne, on signalera à l'Abbaye Saint-Germain d'Auxerre (Yonne), la découverte d'une nouvelle pièce avec fresques en relation avec les célèbres cryptes et l'identification de bâtiments du Haut Moyen Age à l'Est de l'église. A Cluny (Saône-et-Loire) les fouilles et dégagements du Passage Galilée et de la Cour de la Congrégation ont amené la découverte de niveaux d'occupation du Haut Moyen Age et de fondations de murs à rattacher à un bâtiment contemporain de la construction de la grande église de Cluny III. Aucune trace de Cluny I n'a été retrouvée. Le réaménagement de la Place du Marché de cette même ville a permis de repérer les piles de maçonneries de la galerie Ouest des écuries de Saint-Hugues ainsi que diverses fondations dont celle d'un mur d'enceinte. A La Charité-sur-Loire (Nièvre) les travaux préalables aux restaurations M. H. sont à l'origine de la découverte d'une galerie gothique, tangente au chevet de l'abbatiale, qui reliait l'église Saint-Laurent à la ville.