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L'ARCHEOLOGIE EN HAUTE-NORMANDIE (1993)
BILAN ET RESULTATS

(Eure, Seine-Maritime)


Source: "Bilan Scientifique 1993", Ministère de la Culture et de la Communication, Direction Régionale des Affaires Culturelles de Haute-Normandie, Service Régional de l'Archéologie, 1994, pages 9 à 16.


Préface (de Anita WEBER, Directeur Régional des Affaires Culturelles de Haute-Normandie)

Pour la communauté archéologique et son histoire, l’année 1993 restera une année très importante.

Importante fout d’abord par ce tragique accident survenu en région Nord-Pas-de-Calais. Ce douloureux événement doit inciter désormais tous les responsables de chantiers archéologiques à encore plus de vigilance et de prudence. Il impose comme l’a rappelé Monsieur le Ministre de la Culture et de la Francophonie, le respect sans restriction, des consignes de sécurité.

Importante ensuite par la poursuite, dans le cadre de la politique de déconcentration des services de l’État, des réformes administratives du contrôle scientifique. C’est sur ces bases sous l’autorité des Préfets de Régions et la responsabilité des Directions Régionales des Affaires Culturelles (Service Régional de l’Archéologie) qu’à partir de 1994-1995 doit être mise en oeuvre la politique de sauvegarde, d'étude et de valorisation du patrimoine archéologique.

Dans ce contexte de réformes et à un moment où le public manifeste un intérêt sans cesse plus grand pour le patrimoine, l’archéologie régionale connaît une évolution sans précédent Elle est caractérisée aujourd’hui par un grand nombre d’opérations de terrain qui concernent des vestiges enfouis ou en élévation, des budgets importants, une professionnalisation des équipes et un partenariat élargi.

Tous ces changements imposent dans la pratique quotidienne, pour la communauté archéologique régionale, la présentation de problématiques très rigoureuses et le respect des obligations administratives.

Je tiens à souligner la qualité scientifique et la diversité du bilan scientifique 1993. Présenté par le Service Régional de l’Archéologie, ce troisième volume d'informations archéologiques s’adresse aussi bien à la communauté scientifique qu'aux partenaires locaux.

Je profite également de cette opportunité pour féliciter les chercheurs professionnels ou bénévoles qui, avec patience et méthode, contribuent au niveau régional à une meilleure connaissance de l'homme, de l'époque préhistorique à l'ère industrielle.

J'espère qu'au delà des temps nécessaires aux analyses et aux études, ces richesses du patrimoine archéologique de la Haute-Normandie pourront faire l'objet de présentations muséographiques et de manifestations diverses à l’intention du public et des scolaires.


Avant-Propos (de Xavier DELESTRE, Conservateur Régional de l'Archéologie de Haute-Normandie).

Pour la troisième année consécutive, le « blan scientifique régional » donne aux chercheurs la possibilité de présenter rapidement les premières conclusions des opérations archéologiques autorisées au cours de l'année. Il permet également de souligner les caractéristiques d'une recherche régionale ici, en pleine mutation; enfin, il permet d'évoquer les grandes lignes des réformes réalisées ou engagées au niveau national par le Ministère de la Culture.

Je voudrais souligner la diversité et l'exceptionnelle richesse de ce bilan 1993, fruit d'un travail que j'espère toujours aussi passionné et collectif. En effet, plusieurs découvertes allant chronologiquement de la préhistoire à l'époque médiévale présentent un intérêt scientifique qui, je crois, dépasse très largement le cadre régional. L'exploitation scientifique de ces nouvelles données archéologiques devraient déboucher rapidement sur de belles et copieuses publications.

L'année 1993, pour la communauté archéologique nationale, restera tout d'abord très marquée dans les mémoires, par l'accident mortel de deux jeunes archéologues bénévoles.

En outre, les réformes engagées en 1992 ont été poursuivies avec une double préoccupation :

Il a notamment été décidé la mise en place de sept commissions interrégionales de la recherche archéologique (C.I.A) composées chacune de sept membres nommés pour quatre ans. Leurs compétences sont définies par l'arrêté du 10/12/1993 créant des groupes d'experts en matière d'archéologie.

La région Haute-Normandie est rattachée à l'interrégion Grand-Ouest dont le siège est à Rennes et qui regroupe les régions de Basse-Normandie, de Bretagne et des Pays de Loire.

La commission se réunira en séance plénière au moins deux fois au cours de l'année 1994. Elle a pour mission l'examen des demandes relatives aux opérations de terrain (prospections, fouilles, projets collectifs de recherche) mais aussi le suivi des opérations autorisées et l'évaluation scientifique à posteriori, à partir des rapports de fouilles ou des documents finaux de synthèse remis au différents services régionaux de l'archéologie.

Par ailleurs, de nouvelles obligations liées à l'achèvement d'une opération d'archéologie préventive sont précisées dans une circulaire publiée en juillet 1993 (élaboration d'un Document Final de Synthèse - D.F.S.) et remise de la totalité de la documentation (écrite, photographique, graphique, informatique ainsi que le mobilier archéologique) au service régional de l'archéologie.

Au niveau régional, l'activité archéologique reste centrée autour de deux pôles principaux.

Le plus important est celui de l'archéologie préventive avec, comme je l'avais évoqué l'an passé, des préoccupations permanentes au niveau de la gestion et des conséquences nombreuses sur le plan humain et scientifique.

Dans ce contexte, près de 400 dossiers ont été instruits par le service régional de l'archéologie débouchant sur 79 opérations archéologiques préventives. Parmi celles-ci, 27 ont de très lourdes implications scientifiques, techniques et financières comme par exemple, le projet du métro-bus de l'agglomération rouennaise. Elles ont été gérées par l'Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (A.F.A.N.) en application de la convention cadre signée le 1er juillet 1992.

Pour l'exécution de ces chantiers de fouilles et des travaux d'études en découlant, un personnel scientifique et technique important a du être recherché et recruté. Au total, 133 personnes ont travaillé sur les chantiers archéologiques réalisés en région Haute-Normandie. 91 sont originaires de la région, dont un fort contingent du département de la Seine-Maritime.

L'analyse des qualifications professionnelles des équipes recrutées pour les opérations de fouilles et les travaux de post-fouilles montre une prédominance de la catégorie des « archéologues fouilleurs qualifiés » (soit un total de 337,5 mois/homme).

De part et d'autre de celle-ci, s'observe une répartition assez homogène avec 278 mois/homme pour le personnel d'encadrement et 207 mois/homme pour les ouvriers de fouilles.

Cette activité implique des financements importants qui avoisinent cette année 32 millions de francs soit 47 % d'augmentation par rapport à 1992. L'examen par postes budgétaires montre que près de 80% de ces sommes sont affectées à la masse salariale.

On distingue trois sources principales de financement qui sont, par ordre d'importance :

Le second pôle prioritaire reste, parallèlement à cette activité de terrain, la réalisation de l'inventaire archéologique régional.

La cellule « carte archéologique » mise en place au printemps 1992 se compose d'une équipe de trois personnes dont deux à 4/5ème et une à mi-temps. Elle a été renforcée cette année par 22 mois de contrats complémentaires attribués à une dizaine de personnes. Ces contributions ont permis de dynamiser et de mieux coordonner les travaux de prospections sur l'ensemble du territoire régional et, en particulier, pour les zones les plus sensibles.

La dotation annuelle (400.000 F) affectée par la Sous-Direction de l'Archéologie à la région Haute-Normandie pour la constitution de cet inventaire national informatisé est depuis 1992 complétée, dans le cadre d'une convention annuelle, par les financements des conseils généraux de la Seine-Maritime et de l'Eure. Ces subventions représentent au total 270.000 F.

A ces financements s'ajoutent des participations extérieures ponctuelles (dotations globales de décentralisation, subventions communales, etc.) pour un montant de 80.000 F.

En 1993, le récolement de la documentation archivée dans les anciens services des directions des antiquités préhistoriques et historiques a été poursuivi ainsi que l'indexation des publications, revues régionales (5700 références) et des ouvrages de la bibliothèque du service (800 ouvrages dépouillés).

Plus de 1000 sites nouveaux ont été enregistrés sur la base nationale DRACAR portant le total des sites archéologiques inventoriés pour la Haute-Normandie à 4200.

Au-delà de ces quelques repères, je formule le voeu qu'à la lecture de ce volume d'informations archéologiques, chacun puisse une fois encore, mesurer l'ampleur du renouvellement des connaissances. Je souhaite enfin que ces pages servent un jour de fil conducteur à de nouveaux travaux d'écriture sur l'histoire du monde rural et urbain de l'actuelle Haute-Normandie et suscitent de nouveaux programmes de recherche.


Bilan et orientations de la recherche archéologique (de Xavier DELESTRE)

Depuis 1974, année de la création des services des directions des antiquités historiques et préhistoriques au sein de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Haute-Normandie, la recherche archéologique a, dans sa pratique et ses structures, considérablement évoluée.

Elle se caractérise désormais :

L'archéologie professionnelle est toujours marquée par le manque d'équipes C.N.R.S. et le déficit en chercheurs pour la préhistoire.

Pour l'archéologie des périodes historiques, il faut se réjouir de la création en 1993 à l’Université de Rouen d'un second poste de maître de conférence chargé d'archéologie antique. Ces deux nominations ont pour conséquence, un développement des travaux de recherche et le démarrage de chantiers-école (commune de Vatteville-la-Rue, Seine-Maritime) en basse vallée de Seine, sur le territoire du Parc Naturel Régional de Brotonne.

Bilan par périodes

Le Paléolithique.

Outre l'achèvement du programme de relevés (P. 8) de la grotte du cheval à Gouy (Seine-Maritime) datée du Paléolithique supérieur qui précède les travaux des Monuments Historiques programmés en 1994, on retiendra pour cette période trois découvertes principales :

Je voudrais souligner enfin pour cette période, la préparation d'une publication collective coordonnée par Mme C. Perlès, présentant pour la première fois dans la région les résultats des fouilles préventives menées dans le cadre des opérations autoroutières A. 28 et A. 29 sur les gisements du Paléolithique moyen d'Etoutteville (Valleville) et de Saint-Saens (le Pucheuil).

Le Mésolithique.

Pour le Mésolithique, le programme collectif de recherche (caractérisation du Mésolithique en Haute-Normandie : ancrages chronologiques) lancé en 1992 par M. A. Paulet-Locard, à la suite d'une série de fouilles (Acquigny, Chéronvilliers, La Mailleraye etc.) a été poursuivi cette année de manière informelle. Cette recherche devrait déboucher en 1994 sur des travaux universitaires et des publications.

Une datation C.14 permet maintenant de rattacher à cette période la sépulture complexe découverte l'an passé à Val de Reuil « les Varennes ».

Le Néolithique.

Le Néolithique est depuis quelques années un axe de recherche privilégié pour la région notamment, dans le domaine du funéraire.

Les grands travaux n'ont jusqu'à présent révélé aucun site néolithique bien structuré malgré la présence d'indices en surface (Seine-Maritime : Fallencourt, Hautot-le-Vatois, Rouville, etc..).

A l'exception de la découverte d'une fosse contenant du matériel attribuable au Néolithique moyen (culture de Cemy) à Gonfreville-l'Orcher (Seine-Maritime), l'essentiel des informations provient des interventions effectuées dans les carrières de la boucle du Vaudreuil (Eure) avec la fouille d'une cinquième sépulture collective sur la commune du Val de Reuil (« Butte Saint-Cyr »). Comme pour trois sites précédemment fouillés, on constate la présence au même emplacement d'une nécropole du haut Moyen Âge.

Les fouilles entreprises dans cette boucle de la Seine depuis près de vingt ans, sont exploitées scientifiquement depuis 1992 dans le cadre d'un programme collectif pluriannuel (le chalcolithique et les sépultures collectives de la boucle du Vaudreuil) coordonné par C. Billard.

Cette recherche est complétée par la réalisation de sondages sur des ensembles inédits (Cléon, Seine-Maritime) et des interventions programmées plus lourdes (Acon, Eure) dans une perspective d'étude et de protection.

Parmi les apports significatifs, citons : la mise en évidence d'architectures primitives en bois (Val de Reuil : « les Varennes » et « la Butte Saint-Cyr »), des observations très précises sur les processus de condamnation de la couche sépulcrale, des données sur les populations découlant directement des travaux anthropologiques de terrain et de laboratoire; enfin, des éléments pour une restitution des architectures et une perception de certains gestes funéraires.

L’Âge du Bronze.

Pour l’Âge du Bronze, aucun travail conséquent n'a été réalisé et, à l'exception de la datation du rempart primitif de Yainville, les résultats obtenus dans le cadre des interventions préventives sont restés très limités en raison de l'importante érosion des sols.

L’Âge du Fer.

Connue pour cette période par des découvertes exceptionnelles, la région a principalement fait l'objet d'études sur les fortifications. Ce thème de recherche a encore été récemment complété par la fouille programmée du site du Vernonnet (Eure) sur lequel a été mis en évidence plusieurs phases de constructions du rempart dont un murus gallicus.

Le développement de l'archéologie préventive a permis, notamment dans le département de la Seine-Maritime, de renouveler considérablement les connaissances et d'élargir les domaines d'études. A titre d'exemple, sur la première section du tracé autoroutier de l'autoroute A.29 (Le Havre-Yvetot), une vingtaine de sites a été étudié.

D'une manière générale, les sites du premier Âge du Fer (Epretot) sont peu nombreux. Les découvertes deviennent significatives à partir de la fin du premier Âge du Fer et les débuts de la période laténienne (Saint-Aubin le Routot, Graimbouville, etc..).

Pour le second Âge du Fer, on note l'apparition à la Tène C et D 1, d'enclos quadrangulaires et à partir de la Tène D 2, celle d'habitat très standardisé notamment aux environs d'Yvetot (Veauville-les-Baons, Criquetot-sur-Ouville, etc. ).

Grâce à la multiplication des grands décapages, il est désormais possible pour le Pays de Caux, d'appréhender l'organisation des terroirs aux environs des zones d'habitats.

Enfin, pour la protohistoire régionale, l'année 1993 restera celle de la découverte exceptionnelle, sur l'emprise de l'autoroute A. 28, du site de Fesques (Seine-Maritime) avec une série de fosses contenant des pieds humains reposant à plat.

L'ampleur des résultats de terrain enrichis des données de la prospection aérienne dans le département de l'Eure, imposent désormais un regroupement des chercheurs, une ouverture aux régions limitrophes et la mise en oeuvre de programmes collectifs de recherche sur des thèmes divers (typologie et l'évolution de l'habitat, des systèmes fossoyés, du parcellaire, de la céramique, de la paléométallurgie, etc.) pour aboutir dans les meilleurs délais à des travaux de synthèse conséquents.

L'époque Gallo-Romaine.

Pour cette période, il faut souligner la persistance d'un déficit en chercheurs et l'absence de programmes de recherche à la mesure de l'importance du patrimoine régional. Quant au bilan scientifique, il reste très contrasté.

Pour les villes, plus particulièrement, Evreux et Rouen, la multiplication des opérations préventives a permis en quelques années de modifier considérablement la perception de l'espace urbain. Cette année encore, des éléments essentiels ont été mis au jour :

L'ampleur de la documentation accumulée rend désormais urgent et prioritaire la mise en oeuvre de programmes de publications. Trois projets ont d'ores et déjà été lancés : le premier concerne les thermes d'Evreux (coordonnateur P. Aupert); le second, le monument funéraire de Rouen (coordonnateur P. Gros); le troisième est en préparation sur l’îlot des Carmes à Rouen.

Pour le monde rural, les grands travaux autoroutiers ont livré malgré l'arasement des sites, quelques données nouvelles (Bermonville, Callengeville, Foucarmont, Gonneville-sur-Scie, etc.) et appelé l'attention sur l'importance du site de Fesques (« le Mont du Val aux Moines »).

Par ailleurs, le service régional de l'archéologie a décidé de reprendre les dossiers des sites du Vieil-Evreux et de Eu « Bois l'Abbé ».

Pour le premier site, un plan de synthèse est en cours d'élaboration sous la responsabilité de P. Eudier, A. Étienne et D. Cliquet à partir des données de fouilles et des prospections aériennes. Au vu de ce document, sera réalisée courant 1994 une série de sondages pour conforter la présentation d'un dossier de protection au titre des Monuments Historiques.

Pour le second site, des contacts ont été pris avec les différents partenaires avec comme objectifs, le récolement de la documentation et du matériel archéologique, la mise en oeuvre d'un programme de publications et de valorisation du site.

Dans une optique similaire, le dossier de la villa de Vieux Rouen (Seine-Maritime) devrait être repris dans le courant de l'année 1994.

Parmi les perspectives pour l'année 1994, il faut signaler le programme de prospections et de sondages sur le territoire de la commune de Vatteville-la-Rue et la préparation d'un programme collectif sur le thème des agglomérations secondaires.

Le Moyen Âge.

Cette période chronologique est marquée par l'achèvement de plusieurs programmes de fouilles (Seine-Maritime : H. 16 - cathédrale de Rouen, abbaye de Saint-Martin de Boscherville. H. 19 - atelier de la Londe; Eure : H. 16 - prieuré de Saint-Philbert sur Risle. H. 17 - château de Gisors) ou, la conclusion très proche pour certains travaux de terrain comme pour la nécropole de Val de Reuil (Tournedos) (H. 16).

Elle est aussi caractérisée par un développement de l'activité dans le domaine de l'anthropologie de terrain menée tant sur les sites ruraux (Fallencourt, Longroy (Seine-Maritime); Poses, Val de Reuil (Eure), etc.) qu'urbain (travaux en cours à Rouen dans le cadre du métro-bus de l'agglomération rouennaise).

Les opérations préventives fournissent également des informations inédites sur les établissements religieux (H. 16) (abbayes de Valmont (Seine-Maritime) et de Saint-Sauveur à Evreux), les châteaux (H. 17) (Château-Gaillard,Eure, Hautot-sur-Mer, Seine-Maritrime), l'artisanat (H. 19) (Evreux : rue Isambard, Rouen : rue Bourg l'Abbé) et offrent l'opportunité d'aborder de façon plus détaillée pour le site de Rouen deux autres thèmes, celui des églises urbaines et des remparts.

Là encore, pour cette période où les recherches ont été pendant longtemps l'un des fers de lance de l'archéologie régionale, il est nécessaire d'aboutir dans des délais raisonnables à des publications scientifiques de synthèse.

L'époque moderne.

Aux opérations menées régulièrement sur les sites des faïenciers rouennais et au programme de fouilles et de prospections sur la paléo-métallurgie (H.19) s'ajoutent à présent des données sur des structures industrielles et de l'habitat (Etoutteville, Mesnil-sous-Jumièges, Seine-Maritime).

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Les prospections diachroniques, les prospections-inventaire, et la carte archéologique

Les prospections diachroniques peuvent être regroupées autour de trois pôles principaux :

En 1994, doit débuter une quatrième étude qui concerne cette fois les abris-sous-roche de la vallée de la Risle (Eure).

Dans le cadre des prospections-inventaire, des études cantonales (Saint-Romain de Colbosc, Tôtes, Gonfreville-l'Orcher) et des études ponctuelles comme par exemple sur la commune du Havre (la forêt de Montgeon) ont été réalisées. L'opération de prospection commencée en 1988 sur le nord de la Seine-Maritime qui couvre actuellement 143 communes à par ailleurs été poursuivie. Les résultats pour l'année 1993 sont de l'ordre de 160 nouveaux sites (dont une quarantaine retrouvée grâce au dépouillement bibliographique, plus d'une centaine par prospection au sol et le reste par prospection aérienne).

En 1994, une douzaine de nouveaux projets devrait pouvoir être initiée avec un axe fort dans la vallée de la Seine (presqu’île de Brotonne) en partenariat avec le Parc Naturel Régional de Brotonne et l'Université de Rouen (département d'Histoire).

Quant aux travaux de la cellule « carte archéologique », ils devraient être marqués en 1994 par deux projets importants : le démarrage de la carte archéologique du Parc Naturel Régional de Brotonne (quatre cantons, deux dans chaque département) et celui de la boucle du Vaudreuil (Eure) avec des projets d'édition sous une forme qui reste à définir.

Les travaux sur la représentation cartographique devraient être intensifiés avec un travail universitaire sur « la représentation cartographique des sites archéologiques » et la poursuite de la collaboration avec la société Décision Graphics et l'Université de Rouen (département de géographie) sur la problématique d'une représentation des sites découverts sur un tracé linéaire (lère section de l'A. 29) intégré dans une aire géographique plus vaste.

Pour conclure ce rapide bilan, je voudrais insister d'une part, sur l'importance du renouvellenemt des connaissances pour des périodes chronologiques comme le néolithique ou la protohistoire ou des thèmes comme la topographie urbaine; d'autre part, sur les nouvelles perspectives de recherche qui se dégagent de cette activité de terrain comme par exemple dans le domaine de l'anthropologie (du néolithique à l'époque médiévale), du paléoenvironnement (Rouen) ou bien encore, de la dendrochronologie avec la possibilité grâce à plusieurs opérations préventives récentes, d'élaborer au niveau régional, une première courbe de référence de la Protohistoire à l'époque médiévale.


Résultats scientifiques significatifs - Préhistoire

ETOUTTEVILLE (76) - « Valleville ».

Cet atelier de débitage de lames a été découvert sur le tracé de la future autoroute A29. Les premières observations stratigraphiques des dépôts quaternaires permettent de situer le niveau archéologique à la fin du pléniglaciaire moyen (entre 60 000 et 40 000 ans) en raison de sa position sous le niveau de Kesselt. Il faut noter ici les particularités techniques de l'industrie qui comporte 3600 objets avec de nombreux remontages et une production exclusive de lames.

La percussion directe au percuteur dur est la seule technique de débitage mise en évidence. La méthode employée consiste en la production d'enlèvements unidirectionnels à partir d'un ou plus fréquemment, de deux plans de frappe opposés. L'exploitation volumétrique des nucléus s'effectue ici selon deux principes : une exploitation de surface (conception Levallois) et une exploitation en volume (conception « Paléolithique supérieur »).

EVREUX (27) - « déviation sud-est ».

La fouille et l'étude stratigraphique réalisées sur ce gisement du Paléolithique final (groupe de Federmesser) permettent d'attester une nouvelle fois la présence d'un apport éolien postérieur à l'industrie tardiglaciaire.

VAL DE REUIL (27) - « Les Varennes ».

Cette opération en carrière a mis en évidence une tombe qui contenait deux inhumations successives (une ayant fait l'objet d'un rangement) dans une même fosse. La tombe ne pouvant être mise en relation ni avec la sépulture collective Néolithique, ni avec les sépultures de l’Âge du Bronze découvertes sur le site, la datation posait problème. Un rattachement chronologique antérieur au Chalcolithique avait été estimé du fait de la présence d'une petite série de lames à patine bleutée et de la crémation d'ossements animaux, essentiellement des bois de bovidés, dans le colmatage supérieur de la tombe.

La datation C.14 effectuée sur les ossements humains en connexion permet de dater maintenant cette sépulture du Mésolithique ancien (Ly. 6239 : 8715 ± 310 BP, soit 8297-7037 av. J.C.).

GONFREVILLE-L'ORCHER - HARFLEUR (76) - « Z.A.C. de Campdolent ».

Au cours de cette opération de diagnostic a été localisée pour la première fois en Seine-Maritime une structure en place contenant quelques éléments lithiques et de la céramique qui se rattachent au Néolithique moyen (culture de Cerny).

VAL DE REUIL (27) - « Butte Saint-Cyr ».

La fouille de cette sépulture collective a permis l'étude de plus de 60 individus répartis en 2 ou 3 phases de dépôt funéraire. La couche sépulcrale était scellée par une couche de blocs de craie d'une trentaine de centimètres d'épaisseur.

Il a par ailleurs été mis en évidence une phase d'utilisation funéraire antérieure à l'installation des orthostates attestée par urne série de fosses qui pourraient témoigner d'une architecture primitive en bois.

Le mobilier découvert est relativement riche (céramiques, pendeloques, objets en cuivre, parures, poignards, pointes de flèches) et peut être attribué au Néolithique final et à la civilisation des vases campaniformes.

YAINVILLE (76) - « Le fossé Saint-Philiberf ».

La fouille programmée réalisée ces dernières années sur la fortification de cet éperon barré situé en fond de vallée de Seine a permis de dégager les éléments d'un poutrage calciné. La datation C. 14 permet désormais d'attribuer à l’Âge du Bronze cet état primitif de la fortification.


Résultats scientifiques significatifs - Histoire

GRAINBOUVILLE (76) - « La Brière ».

Cet enclos curviligne d'une longueur de 120 mètres a été fouillé dans le cadre de l'opération A. 29. L'espace fossoyé est divisé en deux zones. La première a livré plusieurs grandes fosses interprétées comme des batteries de silos, et deux bâtiments rectangulaires. La seconde, d'étendue plus limitée, englobe quelques fosses et trois tombes à incinération de l'époque augustéenne. La partie principale du site est datée de la fin du 1er Âge du Fer et correspond avec le site de Hautot-le-Vatois aux exemples les plus anciens de fermes indigènes dégagés sur ce tracé autoroutier. Sur ce même site, des traces d'occupations du Néolithique et du Bronze final ont été repérées.

FESQUES (76) - « Le Mont du Val aux Moines ».

La fouille est liée au projet autoroutier A. 28. Elle se situe à l'extrémité d'un éperon occupé durant l'antiquité sur une superficie d'au moins quinze hectares. L'intervention a révélé la présence d'une double enceinte avec son entrée.

Les fossés ont livrés des ossements humains, animaux et de l'armement. Entre ces fossés parallèles a été dégagée une douzaine de petites fosses renfermant chacune au fond, posé à plat, une paire de pieds humains (avec parfois le départ de la jambe) tournée vers l'intérieur du site.

Le matériel retrouvé permet de placer ces découvertes à La Tène moyenne.

EVREUX (27) - « Centre hospitalier régional ».

A l'occasion de l'extension de l'hôpital un ensemble thermal de plan rectangulaire, élevé en une seule fois, sur une superficie qui peut être estimée à 3000 m2 a été dégagé.

La fouille a mis en évidence, une « natatio » bordée d'un portique puis d'une galerie, cinq salles (deux « caladaria ») et diverses pièces dont la fonction n'a pas été pour l'instant clairement déterminée. Parmi celles-ci l'une présente un plan rond en fondation surmonté d'une élévation octogonale.

L'édifice aurait été construit au second siècle et détruit à la fin du troisième siècle.

ROUEN (76) - « station Théâtre des Arts ».

La surveillance des travaux de construction de la station de métro « Théâtre des Arts » a permis de retrouver plusieurs aménagements de la berge de la Seine et de récolter dans les ensembles clos (fosses, puits) une grande quantité de restes végétaux (graines de courges, de fenouil; pépins de raisins, de mûres, pommes; noyaux de prunes, de pèches, etc.).

La construction antique la plus importante est un quai qui a une épaisseur totale de 12 mètres. Son parement est constitué de pieux équarris en chêne entre lesquels s’intercalent de grosses pierres calcaires non maçonnées.

Pour l'époque médiévale (XIe-XIIe siècle), plusieurs structures ont été reconnues : une fosse boisée réalisée à l'aide d'éléments appartenant à un tonneau, un ponton ? etc.

ROUEN (76) - « Espace du Palais ».

La seconde phase de ce chantier a été l'occasion de compléter l'étude d'un tronçon de près de 80 mètres, de l'enceinte gallo-romaine en mettant notamment en évidence une tour circulaire.

L'élévation (opus mixtum) a été retrouvée basculée vers l'extérieur. L'analyse archéomagnétique réalisée à partir des briques du parement extérieur livre la datation suivante : 280 ± 15 ans.

La fondation est constituée de deux assises de blocs en grand appareil posées sur une semelle de craie et un réseau serré de pieux. Les 200 blocs dégagés appartiendraient à un grand monument funéraire de plan carré et d'un type architectural inédit. Ce monument est daté du milieu du IIIème siècle.

LONGROY (76) - « La tête Dionne ».

Cette nécropole mérovingienne (fin Ve - début VIIIe siècle) dont 140 tombes ont été fouillées a livré un mobilier très riche et exceptionnel notamment par la présence d'objets d'importation ostrogothique.


Introduction