Arisitum

L'ARCHEOLOGIE EN ILE-DE-FRANCE (1991)
BILAN ET RESULTATS

(Essone, Paris, Hauts-de-Seine, Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis, Val-d'Oise, Val-de-Marne, Yvelines)


Source: "Bilan Scientifique 1991", Ministère de la Culture et de la Communication, Direction Régionale des Affaires Culturelles d'Ile-de-France, Service Régional de l'Archéologie, 1992, pages 7 à 23.


Bilan et orientations de la recherche archéologique - Préhistoire (de Jacqueline DEGROS)

Remarque préliminaire : Le découpage en « programmes » n'est pas la manière la plus adaptée pour rendre compte de l'état actuel de la recherche régionale en pré- et protohistoire. Utilisable pour le Paléolithique (pour la raison conjoncturelle de la présence d'une équipe de pointe - l'URA 275 du C.N.R.S. - qui a longtemps focalisé la recherche sur le Magdalénien, cf. ci-après), il l'est beaucoup moins pour le Post-glaciaire : les opérations les plus importantes actuellement en cours sont, en réalité, « transprogrammes » et s'orientent de plus en plus dans le sens de l'étude diachronique d'un terroir. Ceci, soit du fait de l'existence d'une séquence stratigraphique étalée dans le temps (Bercy, 75; Boulancourt, 77) soit parce que - la majorité des interventions de sauvetage se déroulant sur les vastes superficies des décapages de carrières - les diverses occupations sont rencontrées simultanément, facilitant l'appréhension « horizontale » du site (ex. : Barbey, 77). Ainsi, presque tous les sites relevant de P 12 se retrouvent également en P 15.

P 4 - Sites de plein air du Riss et du Würm ancien

Pour le Paléolithique, aucune opération n'avait porté ces dernières années sur les périodes anciennes (P 4, seul concerné dans la région), non du fait de l'absence de sites acheuléens ou moustériens potentiellement exploitables mais bien plutôt de celle de chercheurs compétents disponibles. Ce défaut empêche la mise sur pied de campagnes de sondages systématiques sur plusieurs gisements repérés, hors vallées alluviales, en prospection de surface et qui mériteraient au moins d’être testés pour choisir ensuite une opération significative plus lourde à monter. En 1991, une rapide intervention de sauvetage a néanmoins été conduite à Villejuif (94) sur un secteur livrant de l'industrie Paléolithique moyen (Responsable M. PHILIPPE).

En milieu alluvial, en revanche, on ne peut plus guère attendre que des découvertes ponctuelles, les bassins propices à la rencontre des nappes anciennes (Marne, Seine en aval de Paris) étant en fin d'exploitation industrielle. Les dernières observations d'envergure possibles en Géologie du Pléistocène moyen/supérieur ancien, avec ses incidences en préhistoire, ont été celles de F. Lécolle dans le Mantois (78) (voir thèse d’État, 1987, éditée en 1989 par le « Groupe Seine » et diverses publications dans le cadre des travaux du « Groupe Seine » et du Centre de Géomorphologie du C.N.R.S. à Caen).

P 5 - Le Paléolithique supérieur ancien

Le Paléolithique supérieur ancien a été peu étudié jusqu'à présent en Île-de-France (une seule opération en 1984/85 conduite par B. Schmider sur le Solutréen - le plus septentrional actuellement connu - de Saint-Sulpice-de-Favières 91). En 1991, la réalisation d'un diagnostic archéologique induit par un projet de golf a permis de reprendre l'étude du site aurignacien d'Herbeville (78), sondé autrefois par P. Simon. La fouille de sauvetage en est prévue pour 1992 (Responsable : J.-M. GOUEDO, S.R.A.).

P 6 - Structures d'habitat du Paléolithique supérieur

C'est donc toujours le Paléolithique supérieur final qui constitue le noyau dur des recherches paléolithiques en Île-de-France avec, en 1991, un remarquable début de développement hors des grands sites « traditionnels ». Il faut noter le rôle fédérateur du Projet collectif de recherche « Ethnologie des habitats magdaléniens du Bassin parisien » (Responsable : M. JULIEN) auquel se sont rattachés tous les intervenants, à un titre ou à un autre, cette année sur du Magdalénien.

Outre l'apport habituel des campagnes conduites à Pincevent (77) et Etiolles (91), trois autres sites de plein-air ont fourni en 1991 des données nouvelles : les deux sauvetages réalisés à Marolles-sur-Seine (77), l'un sur l'autoroute A5 (J.-L. Rieu et P. Alix), l'autre en carrière (P. Gouge), présentent des affinités avec le site de Marsangy (89), plus en amont dans la même vallée de l'Yonne; le sondage prometteur effectué à Donnemarie-Dontilly (77) par P. Bodu et B. Valentin pourrait, lui, relever d'un faciès non encore reconnu dans le Bassin parisien, et, peut-être, en lien avec le nord de la France ou l'Angleterre. La poursuite de la fouille est prévue en 1992.

Dans le même cadre chronologique, un programme de recherche sur les sites d'habitat en grottes ou abris a commencé à l’extrême ouest de la région, associant des chercheurs de l'URA 275, les S.R.A. d’Île-de-France et de Haute-Normandie et les Services archéologiques départementaux des Yvelines et du Val-d'Oise pour une prospection systématique des falaises de Seine en aval de Mantes-la-Jolie et de celles de l'Epte. Cette recherche, qui n'en est qu'à ses débuts, a déjà permis le repérage de plusieurs abris-sous-roche susceptibles de recéler des occupations préhistoriques (Responsable : M.-A. CHARIER), ainsi que la reprise de la fouille (du début du siècle) de celui de Bonnières-sur-Seine (78) (Responsable : G. HABASQUE) où une occupation de courte durée par des chasseurs magdaléniens a été identifiée.

P 12 - Villages et camps néolithiques

Pour le Néolithique, les diverses opérations en cours concernent toutes, à une exception près, les « villages et camps néolithiques », vaste programme dont la diversité est évidente. Les travaux menés dans le sud Seine-et-Marne (Bassée) sous la responsabilité de D. Mordant et P. Gouge, s'intègrent aussi dans le projet collectif « Des premiers Danubiens aux sociétés du Néolithique moyen entre Bourgogne et Bassin parisien » (Responsable : P. DUHAMEL).

Le sauvetage de Barbey (77) (Responsable : S. RENAUD) et la reprise de celui de Jablines « la Pente-de-Croupeton » (77) (Responsable : Y. LANCHON) ont donné de nouveaux éléments sur l’organisation spatiale des habitats Villeneuve-Saint-Germain et leur équipement (très abondant matériel à Jablines).

L'enrichissement des connaissances sur le Cerny n'a pas été moindre, avec, en 1991, la poursuite du sauvetage programmé pluriannuel de Balloy « les Réaudins » (77) (Responsable : D. MORDANT) et de la fouille programmée de l'éperon barré de Boulancourt (77) (Responsable : D. SIMONIN). A Balloy, après la fouille de la nécropole en longs monuments fossoyés, réalisée les années précédentes, la totalité de l'enceinte a été dégagée; à Boulancourt, des structures de retranchement (palissade interrompue) référables au Cerny, ont pu, pour la première fois sur un site de hauteur, être mises en évidence. Par ailleurs, des indices de même appartenance ont également été recueillis, de manière plus sporadique, à Poissy (78) sur l'autoroute A14 (Responsable : P. GRANCHON) et à Herblay (95) dans le diagnostic préalable aux travaux d'une Z.A.C. (Responsable : A. VALAIS).

Pour sa part, l'opération qui a débuté fin 1990 à Paris sur la Z.A.C. de Bercy (Responsable : P. MARQUIS et le S.R.A.) fait déjà de ce site de bord de fleuve un élément capital pour la connaissance du Néolithique et de la Protohistoire. En effet, présentant une véritable succession stratigraphique (fait rarissime en Île-de-France pour les périodes récentes) et des conditions de conservation très favorables grâce au milieu humide, il fournit à la fois l'ensemble des informations souhaitables pour l'étude du paléoenvironnement et un mobilier archéologique de premier ordre.

A partir de là, un corpus de référence pourra être établi, tant pour le Cerny que pour le Chasséen, sans parler des pièces exceptionnelles que sont l'arc en bois d'if (Cerny) et les cinq éléments de pirogues (chasséennes).

Rappelons enfin que Bercy est le premier site chasséen septentrional fouillé en Île-de-France.

P 16 - Sépultures du Néolithique et de l'âge du Cuivre

En dehors des habitats, il faut mentionner la découverte au cours de l'intervention archéologique préalable à la construction de la déviation routière de Marolles-sur-Seine (77) (Responsable : A. BOGUSZEWSKI) d'un ensemble d'inhumations en fosses comprenant deux sépultures individuelles d'enfants et deux multiples, rapportables, si l'on en croit l'unique vase retrouvé, au Néolithique moyen II régional.

P 15 - Cultures du Bronze moyen et du Bronze final

P 17 - Les sépultures de l'âge du Bronze

Pour la Protohistoire, on note toujours l'absence d'interventions sur des sites du Bronze ancien (P 13) ou moyen. Les divers sauvetages dans les carrières des vallées de la Bassée ou de la Marne (77) (Responsables : respectivement, D. MORDANT, P. GOUGE et S. RENAUD; C. DROUHOT et A. BULARD) concernent habituellement des habitats (P 15) et des ensembles funéraires (P 17 et H 2), les deux étant souvent présents sur les mêmes sites dont la fréquentation s'étend du Bronze final au début de la Tène (et où existaient aussi des occupations néolithiques. Voir remarque initiale sur les « programmes »). Il en est ainsi à Barbey, déjà nommé et à Varennes-sur-Seine « Marais du Pont » pour le Bronze final I/IIa (fosses-dépotoirs et incinérations), à Barbey encore et à Fresnes-sur-Marne pour les enclos funéraires, à Marolles-sur-Seine « Motteux » et « Les Taupes » et à Varennes-sur-Seine « les Rimelles » pour les structures d'habitats du Bronze final IIIb/Hallstatt ancien et, toujours à Barbey, pour des fosses et un grand bâtiment sur poteaux du Hallstatt moyen.

Quant à la fouille programmée de Boulancourt, déjà citée pour le Néolithique, elle met en évidence depuis trois ans un système complexe d'utilisation et de fortification de l'éperon au Bronze final IIIb/Hallstatt ancien.

L'opération, qui est la première étude approfondie réalisée dans la région sur un site de ce type, devrait être poursuivie en fouille pluriannuelle.

C'est à la même période qu'appartient l'installation de bord de fleuve retrouvée à Bercy (ensembles de pieux et abondant matériel) dont la destination sera à préciser par les fouilles futures.

Pour le second âge du Fer, outre le sauvetage du site d'habitat de Bazoches-lès-Bray (77) (Responsable : D. MORDANT) (cf. H 9), l'intervention déjà mentionnée sur la déviation de Marolles-sur-Seine a révélé également une petite nécropole d'une vingtaine d'inhumations, contenant un intéressant mobilier métallique (armes et parures) des Ve-IVe siècles avant J.-C. Son étude apportera des informations, nouvelles pour l’Île-de-France, sur la constitution de ces cimetières dans lesquels semblent se distinguer des groupements intentionnels.

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PROJET COLLECTIF

En Île-de-France, un seul « projet collectif » en Préhistoire :

P 6 - Ethnologie des habitats magdaléniens du Bassin parisien (coordinateur : Michèle JULIEN - URA 275)

Depuis quelques années, les recherches s'orientent dans deux directions complémentaires, d'une part, l'étude au niveau régional par de petites équipes, du peuplement tardiglaciaire de la région; d'autre part, l'étude, par un spécialiste, de thèmes transversaux communs aux grandes fouilles programmées d'Etiolles, Marsangy, Pincevent et Verberie, et, lorsque c'est possible, aux autres gisements contemporains. Les thèmes développés en 1991 concernent :

I. LE PEUPLEMENT DU BASSIN PARISIEN AU TARDIGLACIAIRE

Deux zones de la région ont fait, cette année l'objet de recherches afin de compléter la carte du peuplement et d'établir un cadre chrono-culturel.

I.1. Le centre du Bassin parisien et la confluence Seine-Yonne (Pierre BODU et Boris VALENTIN, URA 275).

En 1991, les recherches ont été développées sur la variabilité des industries du Tardiglaciaire dans la région de la confluence Seine-Yonne, grâce à la découverte de nouveaux sites par les prospections et les grands travaux, et à la reprise de séries anciennes.

- Sites magdaléniens

Au-delà des études déjà réalisées à Pincevent et Ville-Saint-Jacques (77), ils ont analysé des séries nouvellement découvertes à l'occasion de grands travaux au Grand Canton et au Tureau des Gardes à Marolles-sur-Seine (77); ainsi qu'une petite série provenant d'un ramassage de surface à Savins (77). Ces trois séries sont caractéristiques du Magdalénien supérieur de la région et présentent une ou plusieurs armatures à dos courbe et anguleux, du type de celles des industries tardiglaciaires du Nord de l'Europe, et connues jusqu'ici dans la région dans le gisement magdalénien de Marsangy (89).

- Sites épipaléolithiques à Federmesser

Deux autres séries lithiques provenant d'une part de l'Horizon III de Pincevent (77), contemporain de l'Alleröd, avec des pointes à dos courbe, et d'autre part d'un ramassage de surface, à deux kilomètres environ au Nord de la Seine, sur la même commune de la Grande-Paroisse (77), peuvent par leurs caractéristiques technologiques être rapprochées des industries à Federmesser du Nord de la France. Il est prévu de faire des sondages sur le plateau de la Grande-Paroisse afin de voir s'il existe des secteurs préservés.

- Un faciès inédit du Paléolithique terminal

A Donnemarie-Dontilly (77), à 18 km. au Nord-Est de Montereau, des ramassages de surface sur le plateau briard avaient livré une industrie de type encore inconnu dans la région. Une campagne de sondages a été effectuée en 1991 sous la direction de P. Bodu et B. Valentin. Deux concentrations lithiques en place ont été mises au jour sur une surface de 10 à 20 m2. Les pièces les plus caractéristiques et les plus nombreuses sont des lames épaisses et lourdes, portant des stigmates de « mâchurage », suggérant, d'après les expérimentations, un usage en pièce intermédiaire sur bois de cervidé ou matière minérale. Le style du débitage rapproche cette industrie de celles découvertes à Belloy (80) et dans le Sud-Est de l'Angleterre, désignées sous le terme de « Long Blade Technology », et datées des environs de 10 000 B.P.

I.2. La confluence Seine-Epte (Marie-Aline CHARIER et Gilles HABASOUE, Service archéologique départemental des Yvelines)

Dans le cadre d'un projet interrégional aux confins de l’Île-de-France et de la Normandie, des prospections et des sondages ont été réalisés dans la seule partie du Bassin parisien ayant livré autrefois des sites en grotte ou abri. L’effort a porté cette année sur la région de Bonnières (78) où la fouille d'un abri, découvert en 1910 a été reprise et des prospections ont été réalisées. Dans l'abri de Bonnières, l'unique niveau d'occupation, situé au sommet des limons pléniglaciaires, a pu être restitué stratigraphiquement et son exploitation en a été terminée. Avec plus de 500 éléments de débitage et un outillage comportant deux lamelles à bord abattu, l'industrie est attribuable à un Magdalénien supérieur classique. L'organisation du sol d'habitat a pu être reconstituée à partir des documents anciens et de la nouvelle fouille. Jusqu'ici, les autres sondages n'ont livré que quelques indices épars d'occupation paléolithique.

Les recherches continuent dans la même zone, elles doivent être poursuivies en 1992 dans le Val d'Oise.

II. APPROCHE CHRONOSTRATIGRAPHIOUE DES GISEMENTS MAGDALÉNIENS PAR LES DONNÉES DE LA MALACOLOGIE (Patrice RODRIGUEZ)

En l'absence de données paléobotaniques, la malacologie est jusqu'ici l'un des seuls moyens d'aborder l'environnement des Magdaléniens du Bassin parisien. Les divers gisements dans lesquels les mollusques sont conservés présentent l'avantage d'offrir un cadre culturel fiable et des données de datation absolue qui permettent de rattacher les populations de mollusques reconnues à un cadre chronostratigraphique.

Les nouveaux sites découverts dans la région de Marolles devraient permettre de compléter la biostratigraphie des mollusques de la région.

III. ÉTUDE DES FOYERS MAGDALÉNIENS (Ramiro J. MARCH, URA 275)

R.J. March a réalisé une nouvelle campagne d'expérimentation et des études en laboratoire afin de vérifier la valeur des résultats obtenus l'an passé sur la durée de fonctionnement des foyers expérimentaux. L’usage de la diffraction aux rayons X et d'un modèle mathématique a permis ensuite de calculer le temps d'utilisation d'un foyer plat de Pincevent (moins de deux heures). Par ailleurs, il a étudié de façon expérimentale le mode de fonctionnement des foyers par rapport à leur type. Deux groupes apparaissent : celui des foyers plats ou dallés qui ont un mode simple avec des phénomènes de conduction; et celui des foyers en cuvette avec ou sans bordure qui présentent des phénomènes plus complexes de conduction et de radiation. De nombreuses observations ont été faites sur les zones de rubéfaction et l'emplacement des taches sur les roches, les différences s'avèrent liées au type de construction et surtout au mode de fonctionnement des foyers. Ces observations seront applicables en particulier aux foyers ayant subi des réaménagements multiples et pour lesquels on ne connaît que la dernière structuration.

L'ensemble des résultats mis en évidence cette année dans les différents thèmes de recherche montre tout le potentiel des connaissances qu'une étude régionale bien menée peut désormais apporter, grâce d'une part à des études spécialisées de plus en plus performantes et d'autre part à leur application systématique aux nouveaux gisements découverts.


Bilan et orientations de la recherche archéologique - Histoire

H 1 - La ville (Michel PETIT)

L'archéologie urbaine en Île-de-France est une archéologie de sauvetage et la localisation des opérations reste donc fonction de celle des projets d'aménagements. Ces opérations qui ne sont donc pas le résultat d'un véritable choix scientifique ont cependant pour avantage, à la suite de leur cumul au fil des années, d'apporter de façon permanente de nouvelles pièces au puzzle que constitue l'histoire de la ville au niveau de ses origines, de son organisation et de son évolution spatio-chronologique.

A Paris comme à Melun, on commence par exemple à mieux cerner l'organisation et l'évolution du bâti gallo-romain et de son réseau de desserte depuis sa création, que l'on peut situer, dans ces deux cas, aux premières années du règne d'Auguste. Par contre la réalité des antécédents proto-historiques reste toujours à démontrer. En effet aucun mobilier, même résiduel, ne vient témoigner de la réalité d'une occupation pré-romaine et les témoins de cette époque mis au jour récemment dans ces deux villes sur de grandes surfaces (fouilles des Jardins du Carrousel à Paris et de l'Hôtel du Département à Melun) sont situés largement en dehors de l'agglomération antique.

A Meaux, l'organisation de la ville du Haut-Empire, implantée dans une ancienne boucle de la Marne, commence à être mieux cernée grâce à une série d'opérations ponctuelles ayant livré notamment un mobilier très précoce d'un grand intérêt pour la connaissance de la céramique gallo-romaine en Île-de-France. De plus, une portion du rempart du Bas-Empire a pu être fouillée sur plus de 8 m à proximité de la cathédrale (cette enceinte possédait une fondation classique en grand appareil de remploi reposant sur un puissant et étonnant massif de meulière haut de 2 m 50).

Le phénomène de continuité de la ville a par ailleurs été remarquablement illustré pour Paris, par la fouille préventive du futur parc de stationnement Saint-Martin-Rivoli. Cette opération a permis notamment de mettre en évidence une occupation pré-urbaine mais surtout quinze phases principales de restructuration du Cardo antique s'étageant du début du Ier siècle de notre ère à la fin du Xe siècle. A noter également pour Paris le progrès considérable de nos connaissances en ce qui concerne la chronologie de la nécropole et du bourg Saint-Marcel dont le caractère satellite au haut Moyen Âge, vis-à-vis de la cité, semble de plus en plus affirmé.

L'évolution de la recherche sur les villes au haut Moyen Âge reste cependant insuffisante. A l'exception de Saint-Denis où cette problématique est largement illustrée par de nombreuses découvertes de vestiges d'habitats et de structures annexes, le problème reste entier à Meaux, Paris, Melun et Argenteuil où cette période n'est représentée que par de rares découvertes ponctuelles dont la synthèse reste impossible. Exception faite des réutilisations antérieures et des édifices à caractère religieux, il semble cependant probable, que cette occupation reste majoritairement de type rural et ne va donc pas présenter le caractère de pérennité qui caractérise, en général, l'occupation urbaine traditionnelle. A noter également, pour Saint-Denis, la découverte d'un nouveau tronçon du double fossé de l'enceinte de Charles-le-Chauve édifiée entre 869 et 877.

Pour le Moyen Âge, l'étude des enceintes urbaines a progressé considérablement notamment à Meaux et Paris. La mise au jour, à Meaux, du rempart du XIIIe siècle dans le quartier du Marché et le long de celui-ci, a révélé des ossuaires contenant un vrac d'os secs (essentiellement d'immatures) comportant des pathologies très particulières. Cette dernière découverte doit sans doute être mise en liaison avec un Hôtel-Dieu tout proche. A Paris, la fouille du Carrousel a permis le dégagement et l'étude d'une importante section de l'enceinte et du fossé de Charles V, ainsi que de ses défenses avancées. De plus, cette opération a permis de mieux cerner le développement du faubourg extérieur et de mettre en évidence les vestiges du manoir de Pierre des Essarts (très bel ensemble de fresques civiles du XIVe siècle). A Beaumont-sur-Oise, une série de sondages a par ailleurs permis de mieux appréhender le développement de la ville vers le sud, à partir du XIIIe siècle, et antérieurement à la construction de la grande enceinte urbaine. Doivent être également signalés à Meaux la fouille de plusieurs édifices religieux dont l'église Saint-Martin et son cimetière (intra-muros) dans leurs états successifs (Xe-XVIe siècles), un secteur de l'église médiévale suburbaine de Saint-Faron (XIVe-XVe siècles).

H 2 - Sépultures et nécropoles (Bruno FOUCRAY)

Il est malaisé de dresser un bilan de ce programme en Île-de-France, tant ce domaine a souffert de la multiplicité des interventions anciennes, souvent sans accompagnement anthropologique, et de l'effort de rationalisation de ces cinq dernières années. Cet effort a conduit à limiter les fouilles spécifiques de nécropoles dans le cadre des opérations programmées. L’intérêt principal étant désormais d'étudier, autant que faire se peut, des populations complètes et homogènes, sur un plan chronologique ou thématique, il devient de plus en plus délicat de concilier cette recherche de haut niveau avec les impératifs d'urgence qui caractérisent la quasi totalité des opérations franciliennes, opérations qui, par ailleurs, sont les seules à offrir les moyens financiers nécessaires à la réalisation d'études complexes et de longue durée.

Avant le haut Moyen Âge, on ne peut que constater le désert de la documentation. Aucune opération d'envergure n'est à signaler pour l'Antiquité, et ce n'est pas la fouille « accidentelle » de quelques rares sépultures à Melun, Marolles-sur-Seine ou à Varennes-sur-Seine (77) qui permet de comprendre les problèmes de l'archéologie funéraire en Île-de-France, ou de faire des progrès significatifs sur la topographie des nécropoles de cette période, ou sur le passage de l'incinération à l'inhumation.

Les fouilles de nécropoles mérovingiennes sont devenues rares. Il s'agit généralement soit de quelques tombes d'un beaucoup plus grand cimetière (Villette - 78), soit de tombes participant à de vastes ensembles funéraires diachroniques de milieux urbains (Paris - rue de la Reine Blanche, Meaux, Melun - avenue Jean-Jaurès, Saint-Denis). Là encore, aucune étude de population n'est réellement possible.

La période carolingienne est, paradoxalement, celle où les progrès sont les plus significatifs et dont les perspectives semblent les plus prometteuses. L'archéologie funéraire des VIIIe/Xe siècles bénéficie du grand nombre d'opérations réalisées sur des habitats en milieu rural et souvent sur d'importantes superficies. Ce progrès est d'autant plus capital, que cette phase est marquée par le passage des cimetières en rangée, isolés des habitats, aux cimetières paroissiaux intégrés dans l'unité villageoise. Deux grandes catégories ont été observées. Dans la première, les inhumations sont associées à un édifice cultuel (Serris, La Grande Paroisse, Poigny - 77), et comportent une population suffisamment abondante pour que l'on puisse y voir de véritables cimetières « villageois ». Ils sont généralement situés à l'extrémité de l'habitat, sans qu'une rupture ne marque véritablement le monde des morts et celui des vivants. C'est sans conteste la nécropole de Serris qui fournit le plus d'indications dans ce domaine. La population complète du village (mi VIIe/fin Xe siècles) a été conservée et est fouillée (961 individus) dans le cadre d'une opération de sauvetage programmé réalisée en étroite collaboration avec deux anthropologues de l'université de Bordeaux. La masse d'informations recueillies est telle que l'étude est toujours en cours, particulièrement en ce qui concerne les aspects liés aux caractères discrets et aux questions des regroupements familiaux, les rituels funéraires et l'état sanitaire de ces populations carolingiennes. La fouille en parallèle de l'habitat, permet d'envisager de disposer dans ce cas particulier d'informations nouvelles sur la démographie. La seconde catégorie regroupe des habitats, semble-t-il de moindre envergure, sans lieu de culte, mais possédant des « zones d'inhumation ».

Regroupant généralement quelques dizaines d'individus, localisés dans une partie du site, un peu à l'écart (Saint-Germain-Laxis, Forges, Servon, Bussy-Saint-Georges - 77/Saint-Germain-les-Corbeil, Saint-Pierre-du-Perray, Villiers-le-Bâcle - 91/Villiers-le-Sec - 95), ils semblent bien correspondre à des cimetières « intercalaires », étroitement associés à ces habitats et sur lesquels n'existe aucune tradition funéraire antérieure et qui n'ont pas survécu à l'abandon de l'habitat qui les a générés. La disparition de l'inhumation habillée à la fin du VIIe siècle ou au début du VIIIe siècle, rend souvent délicat une datation précise des tombes, particulièrement en milieu urbain où elles disparaissent dans la masse des tombes sans mobilier funéraire d'ensembles diachroniques.

L'époque médiévale a vu quelques opérations en milieu urbain mais aucune en milieu rural. A Argenteuil (95), il s'agit du cimetière de l'abbatiale (XIIe/XVIIIe siècles) et à Mantes (78) celui du prieuré Saint-Martin. Dans ces deux cas, les sépultures des XIIe et XIVe siècles sont caractérisées par un emploi intensif du plâtre pour la réalisation de tombes construites, dont certaines avec logette céphalique et dans le second cas de présence de stèles destinées à un marquage extérieur.

Ces éléments, traditionnellement associés à des sépultures du haut Moyen Âge, surprennent dans des contextes aussi tardifs.

Les perspectives de l'archéologie funéraire en Île-de-France devront bénéficier d'un apport accru de l'anthropologie de terrain, et la création en 1991, à l'initiative d'anthropologues contractuels travaillant sur la région, d'une association, le G.A.F.I.F., exclusivement tournée vers ces problèmes et en relation étroite avec les archéologues, augure bien du nouvel élan donné à cette discipline et à la volonté de l'intégrer à tous les niveaux de la réflexion scientifique.

H 3 - Mines et métallurgie (Bruno FOUCRAY)

Si l’Île-de-France n'est pas, a priori, d'un point de vue géologique une région privilégiée d'activité minière, depuis deux ans, les découvertes se multiplient dans le domaine de la métallurgie. Limitée pour l'instant au travail du fer, les témoignages recueillis couvrent une période qui s'étend essentiellement de la fin de l'Antiquité (IVe siècle) au début du Moyen Âge (XIe siècle).

A l'Antiquité tardive appartient une série de structures rectangulaires rubéfiées interprétées comme dés fours-tunnels ou des fonds de forges. Isolés ou groupés en batteries en périphérie des habitats (Servon, Saint-Germain-Laxis), ces ensembles témoignent probablement du travail de forge.

Il n'en n'est pas de même lorsque présents par dizaines sur des surfaces réduites et accompagnés de rares structures d'habitats, ils constituent des complexes qui doivent comprendre d'autres stades du travail du fer (Moisenay).

Il faut attendre le haut Moyen Âge et plus particulièrement la période carolingienne, pour disposer d'ensembles plus complets, dont l'activité essentielle semble tournée vers la métallurgie.

A Bailly-Romainvilliers, d'immenses fosses d'extraction du limon sont comblées par de multiples déchets issus des différents niveaux d'affinage de la limonite.

Quelques structures associées peuvent être assimilées à des bas-fourneaux ainsi qu'à des forges.

A Forges (VIIIe -IXe siècles), un habitat s'est développé sur cette activité où affinage, réduction et forge sont présents, soit par des structures, soit par des témoignages indirects, scories, tuyères, etc.

A Saint-Maurice-Montcouronne, c'est d'un véritable site de production métallurgique qu'il s'agit, datant du Xe et du début du XIe siècles et dont la production a dû être très abondante. Que cette activité soit ponctuelle sur certains sites et destinée à l'usage quotidien, ou qu'il s'agisse de véritables complexes de production intégrant tous les niveaux de l'extraction à la forge en passant par l'affinage et la réduction, ces ensembles, de découverte récente, n'en posent pas moins le problème de la métallurgie du fer, particulièrement sur le plateau briard.

La multiplication de ces découvertes est en contradiction avec l'idée communément admise d'une impossibilité d'exploitation de la limonite présente pourtant par poches dans les limons des plateaux.

Des études pédologiques sont actuellement en cours dans ce secteur et un programme similaire, en relation avec le Centre de Recherche d'Histoire des techniques de l'Université de Paris I, se poursuit sur le canton privilégié de Saint-Chéron dans l'Essonne.

H9 - Terroirs et peuplement protohistoriques (Jean-Claude BLANCHET)

Les recherches dans ce domaine sont récentes en Île-de-France et comme d'autres régions françaises, elles sont provoquées par le développement des travaux de décapage effectués à l'occasion des fouilles de sauvetage. Pour l'instant, les interventions ont porté sur des établissements ruraux de type ferme indigène, sur des hameaux et des structures rurales isolées. Il n'y a pas eu de fouille sur des villages du premier et du deuxième âge du Fer. Une étude particulière est entreprise sur un terroir restreint de quelques centaines d'hectares dans la vallée de la Seine, à la Ferme d'Isle, à Grisy-sur-Seine (Seine-et-Marne). Dans ce cas précis les recherches s'orientent vers l'occupation d'un territoire agricole depuis l'âge du Bronze jusqu'à la période gallo-romaine, avec les distributions spatiales des habitations isolées ou des hameaux, ainsi que les rapports possibles avec les nécropoles. Une exploitation rurale a été fouillée récemment à Bussy-Saint-Georges « Le Champ fleuri » (Seine-et-Marne), dans le cadre du programme de Marne-la-Vallée. Il a été possible de mettre en évidence la nécropole et une zone de silos et de greniers. Cinq établissements ruraux de type ferme indigène de la Tène moyenne et finale, viennent d'être mis au jour à Herblay et à Marines (95) et Bazoches-les-Bray, Chatenay et Marolles (77), sur des superficies de plusieurs hectares.

A Bazoches-les-Bray, le vaste ensemble fossoyé rassemble plusieurs bâtiments à fonctions agro-pastorales et métallurgiques. Les découvertes récentes et les grands travaux envisagés à court terme vont permettre de mettre sur pieds dans les années à venir un programme scientifique plus précis sur ce thème, avec des équipes spécialisées, en liaison avec les régions voisines.

H 11 - Établissements ruraux gallo-romains (Michel PETIT)

Ce thème de recherche est relativement peu développé en Île-de-France et seuls quatre établissements de ce type ont fait l'objet, jusqu'en 1989, de fouilles conséquentes permettant d'en appréhender la nature réelle.

Depuis ces dernières années le développement des grands travaux a entraîné la découverte d'une dizaine de ces sites ruraux dont neuf ont été fouillés en 1991.

Ces établissements ruraux, d'importance inégale, et gérés sur des surfaces très variables, n'ont malheureusement pu être saisis dans leur globalité. S'agit-il de centres de domaines agricoles plus ou moins vastes ou d'implantations satellites dépendant de l'un d'entre eux ?

Si la villa de Tremblay-en-France (95) constituée d'un horreum, d'un ensemble thermal et de bâtiments domestiques et celle de Crespières (78), dotée d'un bâtiment central richement décoré à cryptoportique et colonnade, peuvent correspondre à notre première hypothèse, que dire des sites de Servon, Saint-Germain-Laxis, Bussy-Saint-Georges, La Chapelle-la-Reine (77), Saint-Pierre-du-Perray (91) et Dugny (93) ? Les bâtiments mis en évidence, très lacunaires et fortement érodés, semblent davantage correspondre à de petites fermes ou à des granges couplées à un petit habitat modeste (dispersion spatiale d'une pars rustica) qu'à des centres de grands domaines. Il est bien évident que seule une étude systématique de leur environnement archéologique et de la structure de leur terroir permettra d'avancer des éléments de réponse.

Pour ce qui concerne les antécédents protohistoriques de ces établissements et leurs dates de création et d'abandon, aucun modèle ne semble de règle. Certains d'entre eux, ayant succédé à une ferme indigène sont abandonnés très tôt soit vers la fin du Ier siècle (par ex. Bussy-Saint-Georges). D'autres comme Saint-Pierre-du-Perray et Servon, implantés respectivement et ex-nihilo aux Ier et IIe siècles verront leur occupation perdurer jusqu'à la fin de l'époque carolingienne. Il est bien évident que les raisons de cette diversité sont sans doute multiples. Là encore, il faut bien admettre que les impératifs de l'aménagement ne permettent pas toujours une bonne gestion de ces sites et il serait donc nécessaire que cette problématique soit développée au sein d'un programme de recherche thématique dont la fouille ne serait que l'un des aspects. Des contacts ont été pris dans ce sens avec la Picardie (J.-L. COLLART et D. BAYARD).

H 12 - Agglomérations secondaires gallo-romaines (Michel PETIT)

La recherche sur ce thème, comme c'est également le cas pour l'habitat rural, est peu développée en région Île-de-France. A l'exception des sites de Beaumont-sur-Oise et Jouars-Pontchartrain qui, d'après leur superficie, leurs monuments publics et leur organisation présentent tous les caractères de l'urbs au sens strict du terme, les autres sites d’Île-de-France, fouillés en 1991, de par leur faible emprise au sol et leur position sur une voie de communication, relèvent plus du simple village routier (mutationes ou stationes). C'est notamment le cas pour les sites de Pécy et Réau-Vert-Saint-Denis (77). Nous avons bien entendu exclu de ce thème les sites de Genainville (95) et Souzy-la-Briche (91) qui présentent un caractère exclusivement religieux (lieux de pèlerinage).

Reste le problème posé par la fonction de ces agglomérations. Si les sites de Pécy et Réau, ne présentant aucune activité artisanale et commerciale particulière, peuvent être considérés comme de simples relais routiers, jouant éventuellement un rôle de marché local (mutationes ou stationes), les cas de Beaumont-sur-Oise et Jouars-Pontchartrain sont tout autres. Ces deux dernières agglomérations, de par leur type d'aménagement (insulae organisées autour d'un cardo et d'un decumanus), leur étendue et la nature de leurs monuments publics (forum et basilique à Jouars et théâtre transformé ultérieurement en amphithéâtre à Beaumont) occupaient certainement une place importante au sein d'un terroir particulièrement vaste. Les études en cours sur ces deux sites devraient permettre de préciser leurs fonctions réelles et l'impact économique et commercial qu'elles pouvaient avoir sur le plan local et régional.

H 13 - Les ateliers antiques : organisation et diffusion (Dominique ORSSAUD)

Ce sont essentiellement des sites d'ateliers de potiers qui ont été étudiés en Île-de-France. Les découvertes les plus récentes se situent surtout dans le département des Yvelines.

Ces fouilles récentes renouvellent la documentation sur les productions de céramiques antiques en Île-de-France. Ce thème fera l'objet d'une exposition prévue pour le printemps 1993. Le Service archéologique départemental des Yvelines est à l'origine de ce projet qui bénéficiera des recherches du groupe de travail sur la céramique antique de l’Île-de-France et qui coïncidera avec le congrès de la Société Française d’Études de la Céramique Antique en Gaule qui se déroulera, en 1993, en Île-de-France.

H 14 - L'architecture civile et les ouvrages militaires gallo-romains (Danielle MAGNAN)

Concernant ce programme, seule une découverte remarquable est à signaler relative aux ouvrages militaires.

Il s'agit d'une fouille, réalisée à Melun-Damary (77) près de la Seine et non loin de l'agglomération antique, qui a permis de mettre au jour un camp romain constitué de baraquements et d'un fossé défensif. Les baraquements construits sur poteaux sont alignés à l'intérieur d'une enceinte délimitée sur trois côtés par le fossé et sur le quatrième côté par la Seine.

Ce camp semble être une installation temporaire datant de 50-20 avant J.-C. auquel a directement succédé une villa péri-urbaine abandonnée au IIe siècle.

H 15 - Sanctuaires et lieux de pèlerinages protohistoriques et gallo-romains (Danielle MAGNAN)

Des fouilles et des études de grande ampleur sont faites sur les sites culturels de Meaux « La Bauve » (77) et de Genainville « Les Vaux de la Celle » (95).

Les investigations portent sur des surfaces conséquentes : plus de 2 ha à Meaux (sanctuaire et abords) et sur près de 5 ha pour Genainville (temple, théâtre et habitat).

A Meaux, la fouille a permis de révéler un sanctuaire composé d'une enceinte quadrangulaire avec entrée monumentale à l'est et un imposant monument composé de deux bâtiments symétriques à plan centré.

Antérieurement à ces éléments gallo-romains, construits entre la fin du Ier siècle et le début du IIe siècle pour être démolis à la fin du IVe siècle, des structures pré-romaines ont été mises en évidence tout d'abord au niveau de l'entrée orientale, et depuis peu, vers le monument à plans centrés.

A la « Bauve », on est en présence d'un vaste sanctuaire gallo-romain péri-urbain ayant succédé à un ensemble cultuel pré-romain (présence de fourreaux d'épée ployés de la Tène).

Sur le vaste ensemble de Genainville, comprenant un théâtre, un temple et de l'habitat, la fouille a permis de préciser la construction de l'édifice de spectacle à la fin du IIe siècle et son état inachevé; l'édification du temple au début du IIIe siècle, et de mettre en évidence, à l'est de l'ensemble, une zone de structures d'habitat.

On semble être en présence d'un triple ensemble monumental associé à une agglomération secondaire.

Les investigations réalisées sur ces deux sites sur de grandes surfaces sont axées sur l'architecture gallo-romaine en liaison étroite avec le C.N.R.S. (Institut de recherche sur l'Architecture antique de Paris) et de nombreux chercheurs et laboratoires.

De plus, à Meaux une convention culturelle va permettre, dans les années à venir, une présentation des vestiges dans le cadre d'un jardin public et peut-être d'un musée de site. Quant à Genainville une étude préalable est en cours dans le cadre de la Loi Programme, relative à la mise en valeur des sites archéologiques.

A côté de ces ensembles monumentaux à caractère religieux, des petits sanctuaires sont à signaler, comme Saclas, Bennecourt ou Châteaubleau.

Sur ce dernier site, une fouille réalisée dans le vicus, près du théâtre, a permis de mettre au jour une série de trois fana installée à l'intérieur d'un double enclos rectangulaire. Deux de ces petits temples sont de fondation tardive (IIIe-IVe siècles).

H 17 - Naissance, évolution et fonctions du château médiéval (Nicole MEYER-RODRIGUES)

VINCENNES (94).

En 1988, les ministères de la Culture et de la Défense ont lancé un vaste programme de restauration et de mise en valeur du Château de Vincennes.

Le principe d'une grande fouille programmée pluriannuelle fut approuvé en juin 1990 avec, notamment, pour objectif l'étude architecturale du monument, celle de ses occupants mais aussi du bois de Vincennes et des communes environnantes, du Moyen Âge à nos jours. Deux thèmes de recherche prioritaires ont été définis : l'étude de la résidence capétienne, dans tous ses aspects, et la recherche sur le matériel archéologique du XIIe au XVIIIe siècle.

La fouille a débuté en mai 1991 à l'emplacement du manoir capétien; elle s'est soldée, notamment, par la découverte des vestiges de la salle de réunion, bâtie par Saint Louis au milieu du XIIIe siècle, qui conservait encore son dallage en carreaux de terre cuite.

Les fondations de la courtine nord-ouest de l'enceinte ont pu être observées à la suite d'une série de sondages et, parallèlement, fut effectué le relevé systématique des marques lapidaires.

A la suite d'une découverte fortuite, une latrine a été fouillée à la tour des salves. L'étude du mobilier contenu dans son remplissage, daté entre 1470 et 1550 sera achevée avant la fin de 1992.

Depuis janvier 1992, la fouille a repris sur l'intégralité de la surface du manoir (Responsable : J. CHAPELOT).

BRIE-COMTE-ROBERT (77).

Ce château, dont la construction semble remonter à la fin du XIIe-début XIIIe siècle, fut démantelé, après sa prise par les troupes royales, au milieu du XVIIe siècle. De plan carré - 55 m de côté - il est entouré de douves en eau, comporte six tours circulaires, et, fait exceptionnel dans la région, deux tours carrées servent d'entrées opposées.

Depuis 1982, différentes campagnes de fouilles, consécutives aux travaux de mise en valeur décidés par la commune, ont permis l'étude de trois tours, la mise au jour des vestiges du logis seigneurial et une meilleure compréhension du réseau souterrain de canaux qui alimentaient les citernes des tours (Responsable : R. BONITHON).

BEAUMONT-SUR-OISE (95). Le Château :

Cette opération débuta en 1984, à l'occasion d'un projet d'aménagement du centre-ville. L'objectif principal de la fouille du secteur castral, implanté sur un éperon rocheux, visait à préciser la date à laquelle, entre le Bas-Empire et la fin du haut Moyen Âge, l'habitat de Beaumont-sur-Oise se déplace d'un site de plaine vers un site de hauteur. Du Xe au XVIIIe siècle, deux pôles d'implantation ont été étudiés : au sud de l'éperon rocheux, une occupation militaire; au nord et à l'est, une occupation religieuse. Au XIIe siècle, un donjon en pierre entaille partiellement la motte castrale primitive et, à la fin du XIIIe-début du XIVe siècle, une enceinte unique flanquée de grosses tours se substitue aux deux enceintes concentriques initiales (Responsable : Ch. TOUPET).

SAINT-OUEN (93).

Cette année, une fouille de sauvetage urgente a été effectuée dans le centre ancien de la ville, rue Saint-Denis. Elle a permis la découverte des vestiges de deux édifices dont les murs en pierre sont d'appareil soigné. Ces bâtiments sont datés l'un du milieu du XIIIe siècle et l'autre de la fin du XIIIe-début du XIVe siècle; ils correspondent probablement aux annexes d'un des hôtels royaux qui caractérisent le paysage de Saint-Ouen au bas Moyen Âge. En effet, Charles de Valois achète en 1299, puis fait agrandir, un manoir que plusieurs actes du XIVe siècle invitent à localiser à proximité immédiate de la fouille (Responsable : C. HERON).

CHEVREUSE (78). Château-fort de la Madeleine :

Le château de la Madeleine se dresse sur un éperon rocheux qui domine le bourg de Chevreuse. Les fouilles effectuées dans la cour du château, en 1979-1980, avaient mis au jour les cuisines et des éléments de l'enceinte du donjon. Acquis par le département des Yvelines en 1981, cet édifice fait l'objet de travaux d'aménagement et de restauration très importants. Une collaboration de qualité entre les architectes et le Service archéologique départemental a permis d'effectuer toute une série d'observations fournissant des informations nouvelles sur l'évolution architecturale du bâtiment (Responsable : B. DUFAY).

MARLY-LE-ROI (78). Château :

La fouille menée depuis 1985 sur l'ancien domaine royal de Marly concerne des bâtiments dont la construction, voulue par Louis XIV, fut dirigée par l'architecte Mansart. Elle constitue en Île-de-France la seule opération qui s'inscrive dans le cadre de l'archéologie de la période moderne. Les fouilles, réalisées en divers endroits du parc ont porté sur des pavillons, aménagements de jardins (bassins, cascades). Quelques vestiges de décors des pavillons, ainsi que des objets mobiliers domestiques du XVIIIe siècle furent mis au jour (Responsable : B. BENTZ).

SOURDUN (77). Le Vieux Château :

Cet établissement était, à l'origine, une fondation religieuse de l'ordre de Grandmont, déjà citée en 1180. En 1991, une salle de grande dimension, datée du XIVe siècle et préalablement reconnue en 1983 et 1985, fit l'objet de sondages. Elle est interprétée comme salle d'apparat en raison de ses dimensions, de la présence d'une cheminée et de la qualité de son dallage en carreaux de terre cuite (Responsable : R. FRICHET).

CHAUSSY (95). Château bas du domaine de Villarceaux :

Les travaux de restauration de ce domaine, en vue de la création du Musée de l'Art et de l'Histoire des Jardins, ont permis une intervention archéologique. Le site comprend un manoir du XVIe siècle, celui de Ninon de Lenclos et les vestiges d'un château plus ancien. Les sondages effectués ont notamment mis au jour un système complexe d'adduction d'eau.

Le « Groupe de Recherche Art Histoire Architecture et Littérature » vient d'achever une étude concernant la fortification médiévale en Île-de-France. Elle consiste en un bilan des travaux de restauration et de mise en valeur de ce patrimoine régional et inclut également l'analyse des partis architecturaux (Responsable : Herveline DELUMEAU).

H 18 - Villages et terroirs médiévaux et post-médiévaux (Bruno FOUCRAY)

Ce programme couvre deux grands types d'intervention en Île-de-France. D'une part, il s'agit des grands habitats du haut Moyen Âge (Ve-Xe siècles) qui font l'objet de nombreuses investigations sur la région, et, d'autre part, de quelques interventions sur des fermes ou établissements assimilés des XIIIe-XVIe siècles. La caractéristique principale de cette première série d'établissement est leur extension. En cela ils ne diffèrent pas des habitats protohistoriques auxquels ils se rattachent encore par le type de structures. Celles-ci (fours domestiques, silos, fosses, trous de poteau, fonds de cabane, etc.) se révèlent redondantes d'un site à l'autre. Il est bien rare que l'ensemble d'un établissement soit appréhendé dans sa totalité et le bilan que l'on peut dresser pour l'année 1991 diffère peu de celui des années précédentes. La permanence d'occupation depuis l'Antiquité est fréquemment attestée (Servon, Saint-Germain-Laxis, Vert-Saint-Denis, Bussy-Saint-Georges, Saint-Pierre-du-Perray, etc.). Il s'en dégage cependant une constante : l'occupation mérovingienne se cantonne systématiquement dans les parties de la pars rustica des villae les plus proches de la pars urbana, et les développements que l'on observe montrent que ce respect initial se trouve très largement transgressé au début de l'époque carolingienne, ignorant même parfois les anciens bâtis.

La répartition chronologique des sites se révèle très variable d'un secteur à l'autre de la région. Ainsi, dans le pays de France (Thieux, Tremblay-en-France) et dans le département de l'Essonne (Saint-Pierre-du-Perray), lorsqu'il ne s'agit pas de créations ex-nihilo de la fin du Ve siècle, la période mérovingienne est très bien représentée. A contrario, la plupart des sites du plateau briard (Seine-et-Marne) offrent rarement des vestiges des premiers temps du haut Moyen Âge, et quand ceux-ci sont présents leur développement est toujours limité dans l'espace. La période carolingienne, et plus particulièrement les IXe et Xe siècles marque un développement considérable des habitats, tant dans leur nombre que dans l'espace. Des ensembles de plusieurs hectares sont fréquents et posent le problème de l'évaluation de leur statut économique et social. On observe, entre autres, l'apparition de zones d'inhumation, que l'on ose encore appeler des nécropoles, comprenant quelques dizaines d'individus (Servon, Saint-Germain-Laxis, Saint-Pierre-du-Perray, Bussy-Saint-Georges) groupés au contact immédiat des zones d'habitat. L'activité est, bien entendue, essentiellement agricole, cependant les traces d'organisation d'un travail collectif ou à vocation artisanale se dégagent de ces sites. Les aires de cuisson (fours domestiques), gagnent progressivement la périphérie des habitats tout en devenant moins nombreux et de plus grandes dimensions, attestant d'un regroupement de cette activité dans l'espace et de son caractère de plus en plus collectif (Marolles-sur-Seine, Varennes-sur-Seine). Une forme standard de fonds de cabane, à deux poteaux axiaux, et deux ou trois cuvettes marquant l'emplacement du métier à tisser, caractérise une activité liée au tissage, spécialement au Xe siècle. Enfin, le travail du fer est bien attesté, en relation avec une exploitation jusqu'alors réfutée de la limonite (Cf. Programme H3). Toutes ces activités posent un problème de fond quant à leur rôle dans l'économie des sites. Si dans de nombreux cas la modestie des vestiges permet d'envisager une production limitée à l’autoconsommation, certains ensembles offrent des caractères qui nous rapprocherait d'une véritable activité artisanale, destinée à un marché au moins local.

Si les problématiques qui sous-tendent nombre de demandes paraissent de prime abord redondantes, à l'image des structures rencontrées, il ne faut pas perdre de vue la relative nouveauté de ce genre de sites. Leur identification comme villages ou manses, reprenant en cela les termes utilisés par les documents d'époque ou des notions propres au plein Moyen Âge, masquent en réalité le besoin d'exemples comparatifs, condition indispensable à la réalisation d'une synthèse. Les quelques exemples dont nous disposons d'ores et déjà en Île-de-France montrent une grande disparité suivant les périodes et les secteurs géographiques. Aux grands habitats exclusivement carolingiens (IXe-Xe siècle), témoignages d'implantations de populations nombreuses, s'opposent la permanence des habitats issus des domaines antiques (plateau de Brie) et les habitats mérovingiens de création précoce (pays de France).

L'absence de publications dans ce domaine fait cruellement défaut, particulièrement en ce qui concerne l'identification du mobilier céramique. De plus les formes de l'urbanisation actuelle coïncident rarement avec l'extension des habitats dont nous ne percevons généralement qu'une partie, et exceptionnellement le terroir (Serris).

Le cas de l'opération Marne-la-Vallée, grâce à ces quelques milliers d'hectares d'un seul tenant, permet d'espérer que cette lacune pourra être comblée. Il sera dès lors possible de réaliser une véritable confrontation entre un terroir exhaustivement exploré sur le plan archéologique et la documentation d'archive qui, pour ces périodes, est à l'échelle des terroirs et non des sites.

Les habitats du haut Moyen Âge rencontrés en Île-de-France semblent dans leur majorité abandonnés à la charnière du Xe et du XIe siècles. Ces abandons ne révèlent aucune trace d'urgence et doivent probablement être à mettre en relation avec une profonde mutation dans l'occupation de l'espace et dans le paysage social. Un exemple remarquable (Serris) montre que la population s'est considérablement accrue dès la fin du IXe siècle, transgressant toutes les limites de l'habitat et de la nécropole qui avaient été respectées pendant plus de deux siècles, le lieu de culte, une chapelle cémetériale, étant délaissée avant l'abandon de l'habitat, au milieu du Xe siècle. A la fin du Xe siècle, l'ensemble du village est abandonné, probablement au profit d'autres habitats. Ce schéma, qui semble classique, est presque systématique au niveau régional. Il reste à élucider les raisons d'une pareille mutation, que les historiens plaçaient jusqu'alors au XIIe siècle.

Les terroirs médiévaux restent beaucoup moins bien perçus. A Poigny, Bussy-Saint-Georges et Saint-Pierre-du-Perray, les éléments d'un établissement médiéval, de type ferme, apparaissent au XIIIe siècle. De vie courte, ces établissements disparaissent avec la crise qui marque le XIVe siècle. Dans un cas, à Poigny, une nouvelle ferme vient s'installer à la fin du XVe siècle. Les relations de ces établissements agricoles avec des habitats plus anciens sont rares et quand elles existent apparaissent comme purement conjoncturelles. Le hiatus que semblent présenter les XIe et XIIe siècle n'a pas encore été résolu. Les pulsations des habitats sur la longue durée sont pour la période médiévale encore largement à comprendre, quand bien même leurs repères chronologiques seraient à peu près fixés.

H 19 - Les ateliers médiévaux et modernes (Nicole MEYER-RODRIGUES et Dominique ORSSAUD)

Nos connaissances se sont enrichies, en 1991, en ce qui concerne la production de céramiques régionales. Dans le village de Fosses (95), deux sites d'artisanat potier ont été mis au jour. Sur l'un d'entre eux, deux fours du XIIIe siècle et un four fin XVe-XVIe siècle ont été fouillés, associés aux vestiges d’un bâtiment, à des fosses d'extraction d'argile et à des tessonnières. Nous pouvons d'ores et déjà avancer que les céramiques de la fin du XIIe-début XIIIe siècle offrent des caractéristiques les distinguant nettement des poteries les plus répandues à Paris et aux alentours (Responsables : X. DELESTRE et R. GUADAGNIN).

En Île-de-France, d'autres sites de production sont connus. A Meaux (77), en 1988, un four de potier du XIVe siècle fut découvert fortuitement. La production céramique qui lui était associée présente des caractéristiques, tant morphologiques que techniques, identiques aux poteries les plus fréquemment recueillies dans la région. Ce matériel est en cours de publication (Responsable : D. MAGNAN).

La troisième production n'est attestée qu'au sud de la Seine. Il s'agit de la céramique dite « à pâte rouge », produite à Dourdan (91). En périphérie de la ville, au lieu-dit « Le Madre », un atelier de la seconde moitié du XIVe siècle fut fouillé de 1982 à 1985. De 1987 à 1989, sur le site de l'auberge du château, un autre atelier, comprenant notamment un four rectangulaire de 4 m de long, a livré des céramiques datées du XIIIe à la fin du XIVe siècle. Dans la vallée de l'Orge, l'activité potière est attestée antérieurement : à Roinville-sous-Dourdan, un four carolingien a livré des céramiques à pâte beige ou grise (Responsable : L. BOURGEAU).

Quant à Saint-Denis (93), les neuf sites de production potière recensés au nord de la basilique pour la période fin XIIIe-début XVe siècle sont en cours de publication. Par ailleurs, l'importante activité artisanale du bourg médiéval se traduit, notamment, par la découverte de bas-fourneaux mérovingiens, de rebuts d'ateliers de savetiers (IXe et fin XIVe-début XVe siècles), d'ateliers de patenôtriers post-médiévaux et d'un dépotoir d'atelier d'orfèvre du début du XIVe siècle.


Résultats scientifiques significatifs

Le Paléolithique a connu en 1991 une activité renouvelée et notablement élargie, pour la première fois depuis longtemps, hors des sites-phares habituels de Pincevent (77) et d'Etiolles (91) qui continuent néanmoins à jouer un rôle moteur, en particulier dans le cadre du Projet collectif "Ethnologie des habitats magdaléniens". A Herbeville (78) des sondages de diagnostic, liés à l'implantation d'un golf, ont porté sur le seul site aurignacien bien attesté jusqu'à maintenant en Île-de-France. Les interventions sur des gisements magdaléniens ont été motivées, soit par des sauvetages (à Marolles-sur-Seine, 77, un second site, en carrière, est venu s'ajouter à celui découvert l'an dernier sur l'A5, qui lui a livré cette année plusieurs structures de combustion appareillées. Dans les deux cas, la prédominance des restes de chevaux est notable), soit par la volonté d'ouvrir la recherche à de nouveaux secteurs : plateaux du sud Seine-et-Marne avec le sondage de Donnemarie-Dontilly qui paraît appartenir à un faciès non encore reconnu dans la région (grandes lames et éclats mâchurés, rappelant les industries tardives du nord de la France ou d'Angleterre) et zones de falaises susceptibles de receler des abris occupés dès la fin du Paléolithique (prospection entamée dans les Yvelines avec la reprise de la fouille ancienne de l'abri de Bonnières-sur-Seine).

Plusieurs chantiers importants ont concerné le Néolithique et la Protohistoire. Sur l'habitat Villeneuve-Saint-Germain de Jablines "la Pente de Croupeton" (77), la grande maison (22,5 m.) pressentie précédemment a été entièrement dégagée tandis qu'à Barbey (77), un autre village de la même culture était mis en évidence, dans un site également fréquenté au Bronze final et au Hallstatt.

Pour le Cerny, avec l'achèvement de la fouille de la grande enceinte de Balloy (77), on dispose maintenant de données complètes sur un site dont la nécropole (à longs monuments) avait fait l'objet des campagnes antérieures. La poursuite de la fouille de l'éperon barré de Boulancourt (77) a, elle, fourni des éléments nouveaux sur le mode de fortification du site, tant pour l'occupation correspondant au Cerny (existence d'une palissade interrompue, premier cas d'ouvrage de ce genre rencontré sur un site de hauteur de cette période) que pour celle du Bronze final/Hallstatt ancien (double fossé avec aménagement d'une entrée).

A Paris même, où les interventions en préhistoire ne sont pas fréquentes, le suivi des premiers travaux de la Z.A.C. de Bercy a révélé, dans des conditions de conservation exceptionnelles, en bordure de fleuve, un site stratifié occupé du début du Post-glaciaire à l'Âge du Fer. Les niveaux Cerny et Chasséens ont livré un matériel considérable (dont des pièces remarquables : arc, pirogues) et tout le cortège d'informations permettant la reconstitution de l'environnement.

A Marolles-sur-Seine (77), commune d'une extrême richesse archéologique au confluent Seine-Yonne, une intervention préalable à la construction d'une déviation routière a révélé plusieurs zones funéraires, en particulier un ensemble de quatre sépultures (dont deux multiples vraisemblablement rapportables au Néolithique moyen II et une petite nécropole à inhumations de la Tène ancienne comportant un intéressant mobilier métallique.

Le bilan scientifique pour les périodes historiques est relativement positif malgré le très petit nombre de fouilles programmées et d'études thématiques portant sur les divers points de la problématique régionale de recherche mise en évidence dans les cinq dernières années. Un certain nombre d'aspects restent peu connus et posent de gros problèmes quant à la compréhension globale de l'organisation et de l'évolution des terroirs. On peut citer pour exemple de ces lacunes notre méconnaissance des nécropoles gallo-romaines en général (une seule intégralement fouillée à ce jour) et notamment celles du Haut-Empire. Nous ignorons par exemple pratiquement tout de la situation topographique des nécropoles rurales par rapport à l'habitat et quel était le mode de sépulture pratiqué en Île-de-France au 1er siècle.

Sur le plan de l'archéologie urbaine, l'absence d'un véritable choix scientifique, dû à la nature même des opérations (fouilles de sauvetage) laisse en suspend certain centres d’intérêt comme celui de l'origine protohistorique ou de l'occupation des cités au haut Moyen Âge. Par contre la trame de la ville (notamment à Paris, Meaux et Melun), à l'époque gallo-romaine est de plus en plus perceptible grâce à des opérations successives, menées dans des secteurs topographiquement très proches.

En revanche, l'absence de fouilles programmées exhaustives ou de programmes de recherche thématique sur les agglomérations secondaires ou les établissements ruraux gallo-romains limite considérablement, malgré des découvertes ponctuelles significatives (notamment à Beaumont-sur-Oise), nos connaissances sur ces thèmes particuliers.

Le problème de l'organisation des ateliers de potiers et de la diffusion de leurs produits, s'il est loin d’être clairement perçu, a bénéficié de plusieurs apports de tout premier ordre dont celui de la fouille de La Boissière-École (78). Un certain nombre de chercheurs se penchent actuellement sur cette problématique et une exposition, qui se tiendra dans les Yvelines au printemps 1993, devrait concrétiser ce travail de synthèse.

Par contre, le développement considérable d'une archéologie de sauvetage portant sur de vastes superficies, suite aux grands travaux (villes-nouvelles, infrastructures routières et ferroviaires, carrières et ballastières...), permet d'ores et déjà d'éclairer d'un jour nouveau notre connaissance de l'évolution de l'occupation d'un certain nombre de terroirs et ceci de l'âge du Fer à la fin du Moyen Âge. Ces grands travaux ont notamment permis, en moins de six ans, la fouille partielle ou totale de plus d'une trentaine d'habitats ruraux du haut Moyen Âge d'un intérêt scientifique majeur. Les données ainsi obtenues, une fois synthétisées, devraient permettre de dresser un tableau relativement fiable du monde rural dans ses différents aspects et ceci pour une époque restée jusqu'alors particulièrement obscure. Ce thème qui sera abondamment traité lors du colloque de l'A.F.A.M. (Paris-octobre 1992), fera d'ailleurs l'objet à la même période d'une importante exposition (Musée de Guiry-en-Vexin -octobre 1992), accompagnée d'un catalogue. Cette publication de haut niveau permettra de faire le point de nos connaissances, de créer des liens entre historiens et archéologues et d'établir ainsi une problématique de recherche commune et adaptée.


Introduction