Arisitum
Voici comme l'abbé SUGER, dans son ouvrage sur la "Vie de Louis VI le Gros" nous décrit la venue, en 1107, du pape Pascal II (consacré le 14 août 1099 - mort le 13 décembre 1118), et ses démélés avec l'empereur Henri V (né en 1081- mort en 1125):
Lannée qui suivit le retour du susdit Bohémond (1), luniversel et souverain pontife Pascal, de vénérable mémoire, vint en Occident en compagnie dune multitude de très sages personnes, évêques, cardinaux et nobles romains (2). Son intention était de consulter le roi de France, ainsi que son fils le roi désigné Louis et léglise des Gaules, au sujet des difficultés et nouvelles querelles relatives à linvestiture ecclésiastique, dont le tourmentait et menaçait de le tourmenter encore davantage lempereur Henri (2bis). Ce dernier, dépourvu damour filial et de tout sentiment dhumanité, allait jusquà persécuter très cruellement son père Henri; il le dépouilla de son héritage et, le tenant, à ce quon disait, en une criminelle captivité, il lobligea avec la dernière impiété, à force de le faire frapper et injurier par ses ennemis, à rendre ses insignes royaux, cest-à-dire la couronne, le sceptre et la lance de saint Maurice (3), et à ne rien garder en propre sur toute létendue de son royaume (4).
Il fut décidé à Rome que la prudence commandait, en raison de la perfidie vénale des Romains, de débattre les susdites questions et même toutes les questions, avec lappui du roi, du fils du roi et de léglise des Gaules, en France même plutôt que de les traiter dans la ville de Rome. Cest pourquoi le pape sen vint à Cluny (5), puis de Cluny à La Charité, où, au milieu dun très grand concours darchevêques, dévêques et de moines, il dédia et consacra ce fameux monastère (6). Là furent aussi les plus nobles barons du royaume et parmi eux le sénéchal du roi de France, le noble comte de Rochefort, lequel se présenta au seigneur pape comme envoyé vers lui pour le servir à discrétion par tout le royaume comme son père spirituel (7). Nous aussi nous assistâmes à cette consécration et, plaidant énergiquement en présence du seigneur pape à lencontre du seigneur évêque de Paris Galon, qui cherchait diverses querelles â léglise de Saint-Denis, nous obtînmes satisfaction conformément à la raison évidente et au droit canonique (8).
Ensuite, après avoir célébré à Tours au sanctuaire de Saint-Martin, mitre en tête (9), comme cest lusage romain, le Letare Jerusalem (10), il se rendit avec bienveillance et dévotion au vénérable lieu de Saint-Denis, comme il eût fait à la propre résidence de saint Pierre (11). Reçu avec éclat et dune façon assez digne dun évêque, il donna aux Romains, pour qui cétait chose insolite (12), et aussi à la postérité, un exemple vraiment mémorable; cest que, contrairement à la vive crainte quon en éprouvait, non seulement il ne montrait aucune prétention à semparer de lor ni de largent ni des pierres précieuses du monastère, mais il ne daignait même pas leur donner un regard. Très humblement prosterné devant les reliques des saints, il versait des larmes de componction et soffrait lui-même de toute son âme en holocauste à Dieu et à ses saints. Il pria instamment quon voulût bien lui donner pour le protéger quelque parcelle des vêtements épiscopaux de saint Denis tout trempés de sang : « Ne vous déplaise, disait-il, rendez-nous ne fût-ce quune petite part de ses vêtements, à nous qui, sans murmure, vous lavons envoyé pour être lapôtre de la Gaule » (13).
Il vit venir à sa rencontre en ce lieu le roi Philippe et monseigneur Louis, son fils, lesquels lui présentèrent leurs compliments et leurs voeux, inclinant à ses pieds, pour lamour de Dieu, la majesté royale, suivant la coutume quobservent les rois auprès du tombeau du pécheur Pierre, abaissant leur couronne et se courbant (14). Le seigneur pape les releva de sa main et les fit asseoir en face de lui comme les fils très dévoués des apôtres. Il conféra familièrement avec eux, en sage procédant avec sagesse, au sujet de létat de lÉglise et, les flattant délicatement, il les supplia de prêter assistance à saint Pierre et à son vicaire, de maintenir lÉglise en sûreté et, conformément à lusage établi par leurs prédécesseurs les rois de France Charlemagne et les autres, de résister hardiment aux tyrans et aux ennemis de lÉglise et par-dessus tous à lempereur Henri. Ils lui tendirent les mains en témoignage damitié, daide et de conseil, mirent leur royaume à sa disposition et lui adjoignirent, pour se hâter daller avec lui à Châlons au-devant des messagers de lempereur, quelques archevêques et évêques et labbé de Saint-Denis Adam, que nous aussi nous accompagnâmes.
Il y avait déjà un certain temps que le seigneur pape attendait à Châlons (15), quand les messagers de lempereur Henri arrivèrent, ainsi quil avait été convenu. Ils montraient non de lhumilité, mais de la raideur et de la morgue. Ayant pris logis à Saint-Menge (16), ils y laissèrent le chancelier Adalbert, dont lempereur lui-même suivait les inspirations, en accord avec lui de bouche et de coeur (17). Les autres se rendirent à la cour du pape en grand cortège, avec un grand faste, tout couverts de clinquant. Cétaient larchevêque de Trèves, lévêque dHalberstadt, lévêque de Münster (18), et plusieurs comtes, et enfin le duc Welf, qui faisait porter partout une épée devant lui, personnage corpulent, dune prodigieuse surface en long et en large, de plus un braillard (19). Ils faisaient tous un tel tumulte quils semblaient avoir été envoyés pour inspirer la terreur plutôt que pour raisonner.
A part et seul, larchevêque de Trèves, homme distingué de manières et agréable, abondant en discours et en sagesse, rompu à lusage de la langue française, parla très bien, apportant au pape et à sa cour salut et service de la part du seigneur empereur, sauf le droit du royaume. Et, poursuivant, au sujet de sa mission : « Voici, dit-il, pour quel motif notre seigneur lempereur nous envoie. Au temps de nos prédécesseurs (20) et aussi des saints hommes apostoliques Grégoire le Grand et autres, cest un fait bien connu quen vertu du droit impérial lordre suivant devait être observé en toute élection : avant de procéder en public à lélection, porter le nom du candidat aux oreilles du seigneur empereur, et, si la personne convient, prendre son assentiment avant lélection elle-même; ensuite dans une assemblée canoniquement tenue, à la requête du peuple, après le choix fait par le clergé, avec lassentiment du suzerain (21), proclamer lélu; celui-ci une fois consacré (22), librement et sans simonie, le ramener vers le seigneur empereur pour les régales, afin quil reçoive linvestiture de lanneau et de la crosse et prête le serment de fidélité et dhommage. A cela rien détonnant; autrement on ne saurait prendre possession ni des cités ni des châteaux, marches, tonlieux et autres choses qui relèvent de la dignité impériale. Que si le seigneur pape admet ces façons de faire, lempire et lÉglise resteront étroitement unis pour lhonneur de Dieu dans la prospérité et en bonne paix ».
Là-dessus le seigneur pape, après réflexion, répondit par la voix de son porte-parole lévêque de Plaisance :(23) « LÉglise a été rachetée par le sang précieux de Jésus-Christ et constituée libre; il faut quà aucun prix elle ne retombe en servitude. Sil ne lui est pas possible délire un prélat sans consulter lempereur, elle se trouve subordonnée à lui comme une esclave et cest pour rien que le Christ est mort. Linvestiture par lanneau et la crosse, alors que de telles choses appartiennent aux autels, est une usurpation sur les droits de Dieu même. Que des mains consacrées au corps et au sang du Seigneur soient, pour contracter une obligation, placées sous les mains dun laïc tout ensanglantées par lusage de lépée, cest une dérogation au sacrement de lordre et à lonction sainte ».
Les messagers écoutèrent sans se laisser fléchir ces propos et de semblables. Avec limpétuosité ordinaire aux Teutons, ils grinçaient des dents, sagitaient. Que leur audace eût été en sûreté et ils auraient vomi des insultes, ils se seraient livrés à des violences : « Ce nest pas ici, disaient-ils, mais à Rome, à coups dépée, que se videra cette querelle ». Cependant le pape envoya vers le chancelier plusieurs hommes à toute épreuve et pleins dexpérience pour sentretenir avec lui de ces questions sur un ton paisible et posé, afin de se faire écouter, découter eux-mêmes et de le prier instamment de travailler à la paix du royaume. Après leur départ, le seigneur pape vint à Troyes, où il tint en grande pompe un concile général qui était depuis longtemps convoqué (24); puis, le coeur pénétré damour pour les Français, parce quils lui avaient rendu beaucoup de services, et de crainte et de haine pour les Teutons, il retourna heureusement vers le siège de saint Pierre.
Quant à lempereur, au cours de la seconde année environ après son retour (25), il assembla un ost merveilleux, de trente mille hommes. « Se plaisant à ne passer que par des routes baignées de sang » (26), il se dirigea vers Rome, simula avec une étonnante habileté des intentions de paix, renonça à parler de la querelle des investitures et fit beaucoup de bonnes promesses sur ce sujet et sur dautres; mu par le désir de pénétrer dans la ville et considérant limpossibilité dy réussir autrement, il usa de flatteries, sans crainte de tromper ni le souverain pontife et toute lÉglise, ni même le Roi des rois en personne. Alors, entendant dire quune si grave affaire, si désastreuse pour lÉglise de Dieu, était assoupie, les nobles romains, comme il était juste ou plus quil nétait juste, ne se sentirent plus de joie; le clergé tressaillit dallégresse; dans leur contentement, ce fut une lutte à qui le recevrait avec le plus dhonneur et de pompe.
Cependant le seigneur pape, autour de qui se pressait la foule des évêques et cardinaux revêtus de leurs manteaux et montés sur des chevaux blancs que paraient des housses blanches, se rendait en hâte à sa rencontre, suivi de près par le peuple de Rome (27). Il avait envoyé en avant des messagers pour recevoir de lempereur, sous serment prêté sur les saints Évangiles, sa promesse de paix et de renonciation aux investitures (28). A lendroit quon appelle Montjoie (29), qui est celui où léglise des saints apôtres se présente pour la première fois aux yeux des pèlerins qui sy rendent, le serment fut prêté derechef, puis, de nouveau, une troisième fois, sous le porche - admirable spectacle pour tous les Romains - de la propre main de lempereur et de ses barons.
Là-dessus, avec infiniment plus de pompe quun chef vainqueur en Afrique et à qui un arc de triomphe semblerait sourire, aux accents louangeurs des hymnes triomphales, il reçut le diadème, à la façon des Augustes, de la main très sacrée du seigneur pape (30). Ensuite, un cortège précédé par des clercs modulant des cantiques et doù sélevait, pénétrant jusquaux cieux, la formidable clameur des Allemands qui chantaient, le conduisit solennellement, au milieu dune grande affluence, vers le très saint autel des apôtres. Le seigneur pape célébra une messe dactions de grâces (31); après avoir offert en sacrifice le corps et le sang de Jésus-Christ, il partagea lEucharistie, et lempereur, la recevant communia : admirable otage voué à lÉglise en témoignage dune alliance fondée sur un indivisible amour et dans le respect du pacte juré.
Après la messe, le seigneur pape sétait à peine encore débarrassé de ses ornements épiscopaux que, tout à coup, avec une méchanceté inopinée, la fureur teutonne, feignant loccasion dune rixe, se déchaîna en frémissant. Ils tirèrent leurs épées et, courant de toutes parts comme pleins de frénésie, ils sattaquèrent aux Romains qui, ainsi quil convenait en un tel lieu, se trouvaient sans armes. Ils juraient, ils criaient, déclarant quil fallait faire prisonnier ou massacrer le clergé romain, tous tant cardinaux quévêques; et, franchissant les dernières bornes de la fureur, ils ne craignirent pas de jeter sur le seigneur pape leurs mains impies (32). Un deuil inextricable et une profonde douleur semparèrent de la noblesse romaine et du peuple lui-même. Ils se rendaient compte, quoiquun peu tard, de la cabale. Les uns couraient aux armes; les autres, comme interdits, prenaient la fuite; en présence de cette brusque attaque des ennemis, ils ne purent se sauver quen démontant les poutres du portique et faisant ainsi de cette ruine leur défense. Pour ce qui est de lempereur, glacé dépouvante par le tourment du remords que lui inspirait son criminel exploit, il sortit de la ville au plus vite, emportant comme butin - chose inouïe pour des chrétiens et de la part dun chrétien - le seigneur pape et tous les cardinaux et évêques quil put emmener et se retira à Cività Castellana, lieu solidement fortifié et par la nature et par lart (33). Il traita contre tout honneur les cardinaux quil dépouilla vilainement; de plus, ce qui est abominable à dire, dans son orgueil il dépouilla le seigneur pape en personne tant de sa chape que de sa mitre et de tous les autres insignes de son apostolat, sans craindre de mettre la main sur loint du Seigneur. Enfin, après leur avoir fait force torts et les avoir accablés daffronts, il ne les congédia, lui et les siens, que lorsquil les eut forcés à annuler le pacte dont nous avons parlé et à lui rendre par là son privilège. Il alla jusquà extorquer subrepticement de la main du seigneur pape un autre privilège, celui de donner dans la suite linvestiture (34): privilège que nous entendîmes le même seigneur pape, dans un grand concile de trois cents évêques et plus, casser suivant le jugement de lÉglise et mettre à néant en le frappant dun perpétuel anathème (35).
Que si lon demande pourquoi ce seigneur montra tant de mollesse, quon sache que, frappée dans son pasteur et lentourage de son pasteur, lÉglise se trouvait toute languissante et que le tyran, la tenant presque en servitude, loccupait comme son bien propre, parce quil ny avait personne pour lui résister. Le pape en donna par le fait une preuve certaine; après avoir fait délier par tous les moyens possibles ses frères, colonnes de lÉglise, pour la défense et la réparation de lÉglise, et après avoir rétabli la paix tant bien que mal, il se réfugia dans le désert de la solitude et y eût établi sa perpétuelle demeure, si lÉglise universelle et les Romains ne lui avaient fait violence pour le ramener (36).
Cependant Notre Seigneur Jésus-Christ, rédempteur et défenseur de son Église, ne souffrit pas quelle fût plus longtemps foulée aux pieds; il ne voulut pas laisser lempereur impuni. En effet, ceux que ne liait ni nobligeait le serment de foi prirent fait et cause pour lÉglise que ballottait la tempête. Avec laide et sur le conseil du seigneur désigné Louis (37) et dans un concile très nombreux où se trouvait assemblé le clergé de Gaule, ils engagèrent le tyrannique empereur dans les noeuds de lanathème et le percèrent de lépée de saint Pierre (38). Ensuite, passant dans lempire teutonique, ils soulevèrent contre lui les barons et la plus grande partie du pays, déposèrent ses partisans ainsi que Burchard le Roux, évêque de Münster (39), et ne sarrêtèrent pas de le poursuivre ou de le priver de ses biens jusquà juste extinction de sa vie détestable et de sa domination tyrannique (40). La mauvaise conduite de ce prince eut pour conséquence, par leffet de la vengeance divine, un transfert de lempire. Lui disparu, ce fut le duc de Saxe Lothaire qui lui succéda, homme excellent à la guerre, invincible défenseur de lÉtat (41). Accompagné du seigneur pape Innocent, Lothaire dompta lItalie indocile, la Campanie, la Pouille jusquà lAdriatique, les ravageant sous les yeux du comte de Sicile Roger, parce quil sétait fait roi lui-même (42); puis, de retour dans son pays au milieu d un éclatant triomphe, il succomba en pleine victoire (43).
Mais que ces faits et dautres pareils soient dépeints par leurs historiens. Nous, appliquons-nous de nouveau à lhistoire de France, puisque tel est notre sujet.
Notes :
1) Fils de Robert Guiscard et de sa première femme, Aubrée. C'est lui « à qui, en raison de sa vaillance, fut tout spécialement rendue, après un vigoureux siège, lenceinte fortifiée de cette ville », au début de lautomne de 1105 (Achille Luchaire, Louis VI le Gros, Annales de sa vie et de son règne, Paris, 1890, in-8°, n° 30)..
2) Pascal II, Rainier, de Bleda en Toscane, bénédictin à Cluny, cardinal-prêtre de Saint-Clément, élu pape le 13 août 1099. Il arriva en France en janvier 1107; il était à Casale le 4 janvier (Jaffé et Wattenbach, Regesta pontificum romanorum, n° 728), à Lyon le 29 janvier (Ibid.)
2bis) Henri V, couronné roi à Aix-la-Chapelle en 1098, rompit avec son père Henri IV au mois de décembre 1104 en feignant de vouloir servir contre lui les intérêts de lÉglise. Enfermé au château de Boeckelheim sur la Nahe, lempereur laissa livrer à son fils les insignes de lempire et finit, pressé de menaces, par abdiquer sans conditions le 31 décembre 1105; il mourut le 7 août suivant. Voir G. Meyer von Knonau, Jahrbrücher des deutschen Reiches unter Heinrich IV und Heinrich V, tome V (1904), pages 203 à 204, 261 à 270, 315.
3) Insigne du royaume de Bourgogne. Voir, sur les origines de cet insigne, R. Poupardin, Le royaume de Bourgogne, 1907, fascicule 163 de la Bibliothèque de lÉcole des hautes études; sciences historiques et philologiques, appendice III, pages 375 à 383.
4) Henri V, couronné roi à Aix-la-Chapelle en 1098, rompit avec son père Henri IV au mois de décembre 1104 en feignant de vouloir servir contre lui les intérêts de lÉglise. Enfermé au château de Boeckelheim sur la Nahe, lempereur laissa livrer à son fils les insignes de lempire et finit, pressé de menaces, par abdiquer sans conditions le 31 décembre 1105; il mourut le 7 août suivant. Voir G. Meyer von Knonau, Jahrbrücher des deutschen Reiches unter Heinrich IV und Heinrich V, tome V (1904), pages 203 à 204, 261 à 270, 315.
5) Il y resta du 4 au 8 février 1107 (Jaffé et Wattenbach, Regesta pontificum romanorum, n° 730).
6) Le 9 mars 1107. Le monastère de la Charité-sur-Loire (Nièvre, arrondissement de Cosne) était un prieuré clunisien.
7) Le roi de France et le pape étaient réconciliés depuis le 2 décembre 1104 (B. Monod, Essai sur les rapports de Pascal II avec Philippe Ier, pages 42 à 43). - Le comte de Rochefort était sénéchal de 1091 jusquà son départ pour la Terre-Sainte, au commencement de 1101. A partir de cette dernière date, le sénéchalat fut confié successivement à Gilbert dit Païen de Garlande, puis, très probablement, à Anseau de Garlande (Recueil des actes de Philippe Ier, roi de France, publié par M. Prou, pages CXXXIX et CXL). Ayant recouvré son office en 1104, Gui de Rochefort ne lexerça pas en fait plus de deux ans; son fils, Hugues de Crécy, le remplaça en 1106 (Ibid.).En mars 1107, il ne devait plus occuper loffice de sénéchal.
8) Galon, élu évêque de Paris vers le mois de juillet 1104, appartenait au parti réformiste et était bien connu de Pascal II, qui lavait envoyé en 1102 comme légat en Pologne. Il contestait à labbé de Saint-Denis le droit de faire consacrer les moines par nimporte quel évêque.
9) Le frigium, ou phrygium tenait de la mitre et de la tiare. Cétait un bonnet conique, blanc, cerclé à sa base dune couronne dor et de pierreries. La tiare à trois couronnes napparut quau XIVe siècle.
10) On le trouve à Tours du 24 mars au 3 avril 1107.
11) Il y était le 30 avril.
12) Suger revient volontiers sur ce sujet de la cupidité des Romains.
13) Allusion à la tradition qui voulait que saint Denis eût reçu du pape saint Clément, au Ier siècle, la mission dévangéliser toute la Gaule; tradition en étroit rapport avec celle de laréopagitisme. Toutefois, Saint Denis de Paris na rien de commun que le nom avec lAréopagite, disciple de saint Paul et évêque dAthènes. La confusion napparaît dans aucun texte antérieur à labbé Hilduin, du IXe siècle. Voir L. Levillain, Études sur labbaye de Saint-Denis à lépoque mérovingienne, dans la Bibliothèque de lÉcole des Chartes, tome LXXXII (1921), pages 31 à 36. Les martyrs compagnons de saint Denis, si souvent mentionnés par Suger, sont les saints Rustique et Eleuthère.
14) La date de cette entrevue ne peut étre que le 1er ou le 2 mai 1107, car le 3 du même mois Pascal II était à Lagny.
15) Depuis le 10 mai environ.
16) Forme vulgaire pour Saint-Memmie, abbaye de Génovéfains, à trois kilomètres à lest de Châlons.
17) Ils se brouillèrent dans la suite; Adalbert, devenu archevéque de Mayence en 1111, se rallia au parti de la Réforme et fut même emprisonné sur lordre de lempereur durant presque trois ans. Il recouvra néanmoins la chancellerie en 1121 et mourut en 1137.
18) Bruno de Brettheim, archevêque de Trèves de 1102 à 1124; Reinhard de Blankenbourg, évêque dHalberstadt de 1106 à 1123; Burchard de Holte ou le Roux, évêque de Münster de 1097 à 1118.
19) Welf II, duc de Bavière depuis 1102. Dabord partisan du pape et mari de la comtesse Mathilde de Toscane, il sétait séparé de celle-ci en 1095 et réconcilié avec lempereur. Il mourut en 1119.
20) Cest-à-dire des empereurs prédécesseurs dHenri V.
21) Proprement du « collateur de lhonneur », en dautres termes de celui de qui est tenu le fief avec les droits et devoirs quil comporte.
22) Henri V luttant pour obtenir confirmation du droit dinvestir lélu avant sa consécration, il faudrait, ce semble : "celui-ci une fois élu", dautant plus que la question de la liberté et de la simonie ne se posait pas pour la consécration. Voir B. Monod, La question des investitures à lentrevue de Châlons (1107), dans la Revue historique, tome CI (1909), pages 80 à 87. La présente traduction suit strictement le texte latin.
23) Aldo Gabrielli, évêque de Plaisance de 1096 à 1118.
24) Il souvrit le 23 mai (jour de lAscension) 1107. Six canons nous en ont été conservés (Mansi, Sacrorum conciliorum... collectio, tome XX, col. 1223). Le pape y affirma sa volonté de supprimer les investitures laïques. Il quitta la France peu après; il était à Valence le 14 juillet, à Lausanne le 29 juillet.
25) Il franchit les Alpes à la mi-aout 1110. Lindication du chiffre de trente mille hommes est confirmée par les autres sources; mais, pour ce qui suit, le récit de Suger - qui en dut recueillir les éléments lors du séjour quil fit à Rome en 1112 - contient des inexactitudes de détail et une grosse erreur. Voir G. Meyer von Knonau, Jahrbrücher des deutschen Reiches unter Heinrich IV und Heinrich V, tome VI (1907), pages 150 à 174 et 369 à 390.
26) Lucain, Pharsale, II, 439 à 440.
27) Le samedi 11 février 1111, larmée impériale campait en vue de Rome. Lentrée solennelle eut lieu le lendemain.
28) Le serment prêté à Sutri le 9 février nentraînait que la promesse de nattenter daucune manière à la vie, à la dignité et à la liberté du pape et de ses fidéles.
29) Ce terme, demploi fréquent au moyen âge, désigne ici la haute colline qui sélève sur la rive droite du Tibre, à deux kilomètres au nord du Vatican. Cest le Monte Mario ou Monte Malo; le nom de Montjoie semble lui avoir été donné par des pèlerins. Voir J. Bédier, Les légendes épiques, tome II, pages 237 à 252.
30) Interversion des faits. Le couronnement dHenri V est bien postéfieur à son entrée à Rome; il date seulement du 13 avril suivant. Le 22 février il avait été rendu impossible par les malentendus qui surgirent dès les premières paroles échangées et aussi par lintransigeance et les propres dissentiments des partisans dHenri V.
31) Pascal II était entouré de gens en armes. Ce qui suit (jusquà « pacte juré ») se rapporte en réalité à la messe du 13 avril.
32) Pascal II fut arrété le soir même du jour de lentrée, mais les bagarres continuèrent le lendemain avec des fortunes diverses; lempereur fut blessé et désarçonné.
33) Le départ eut lieu le 16 février. Cività Castellana est situé au pied du mont Soracte, à une cinquantaine de kilomètres de Rome. Le pape fut installé à Trevi avec quatre cardinaux, le reste des cardinaux à Corcolle, dans la Sabine, tandis quHenri V campait non loin de Corcolle, à Ponte-Lurano, en aval de Tivoli.
34) Le 12 avril, jour de leur retour à Rome (Jaffé et Wattenbach, Regesta pontificum romanorum, n° 6289 et 6290).
35) Au concile qui siégea au Latran du 18 au 23 mars 1112 (Jaffé et Wattenbach, Regesta pontificum romanorum, n° 6310).
36) Pascal II se retira au mois de juillet 1111 dans une des îles Pontines et nen revint quau mois doctobre; le 26 octobre il était de nouveau au Latran (Jaffé et Wattenbach, Regesta pontificum romanorum, n° 6305). Voir à ce sujet une lettre dHildebert de Lavardin, qui justifie sa conduite (Migne, Patrol. lat., tome CLXXI, col. 235).
37) Il était déjà roi depuis 1108. Suger oublie quil sest départi de lordre chronologique. Le compilateur du manuscrit F a substitué les mots « roi de France » (« a regis Francie ») à « seigneur désigné ».
38) Au concile de Vienne, qui souvrit le 15 septembre 1112 sous la présidence de larchevêque Gui de Bourgogne, futur Calixte II. Voir Mansi, Sacrorum conciliorum... collectio, tome XXI, pages 73 à 76.
39) Erreur. En réalité, Burchard fut déposé par un légat du pape en 1105 et, du reste, rétabli dès le mois de janvier 1106. Lors de sa mort, en 1118, il était en pleine faveur auprès dHenri V (Voir G. Meyer von Knonau, Jahrbrücher des deutschen Reiches unter Heinrich IV und Heinrich V, tome V, page 313, et tome VII, page 86).
40) Il ne mourut quen 1125, le 23 mai, dune maladie quil traînait depuis lenfance. Avec lui séteignait la dynastie franconienne, qui avait gardé le pouvoir impérial pendant un siècle.
41) Lothaire de Supplinbourg, duc de Saxe, élu en août 1125. Representant du vieil individualisme féodal, il était en même temps plein de dévouement pour le Saint-Siège, donc doublement en réaction contre la politique de son prédécesseur.
42) Lexpédition de Lothaire II et dInnocent II dans lItalie méridionale date de lété de 1137.
43) Au retour, le 4 décembre 1137, dans une bourgade du Trentin.