Arisitum: L' Enigmatique fondation du quotidien républicain "Le Petit Méridional" (1876) (page 1)


Introduction

Au terme de ses recherches sur "Le Petit Méridional", journal quotidien héraultais d'obédience radicale et radicale socialiste ayant paru entre 1876 et 1944, le professeur Roland Andréani, dans sa thèse sur "La Presse quotidienne de Montpellier, des origines à 1944" (1) , soulignait que les débuts "du premier et principal organe républicain montpelliérain à 5 centimes [demeuraient] obscurs en l'absence de documents relatifs à la fondation " (2).

Afin d'éclairer le lecteur, synthétisons la problématique développée par le professeur Andréani: Le 19 mars 1876, Antoine Sereno et Etienne Camoin, âgés respectivement de 22 et 27 ans, impriment le premier numéro du "Petit Méridional". Ils ont précédemment créé une société en leur nom commun, dont le montant du capital est inconnu.

Le quotidien trouve rapidement des lecteurs dans une région que Jean Sagnes qualifie de "Midi Rouge", mais victime de la politique d'ordre moral du duc de Broglie, il n'en essuie pas moins de 23 procès. Condamné plusieurs fois à de lourdes amendes, "Le Petit Méridional" semble voué à la faillite lorsqu'il est sauvé par une souscription publique en 1877. Dans le même temps, il modernise ses locaux, achète des rotatives performantes (80.000 exemplaires à l'heure) et finance les campagnes législatives des républicains de l'Hérault à hauteur de 13 000 francs (3).

La soudaine bonne santé retrouvée du journal étonne, moins toutefois que les conditions de sa création: comment deux jeunes gens ont-ils pu disposer du capital nécessaire à la fondation et au fonctionnement d'une entreprise de presse, avec un journal vendu au prix de 5 centimes l'exemplaire ? Et qui sont ces deux personnages ?

A ces questions, la consultation des différents fonds d'archives ne donne peu ou pas de réponses. Nulle trace à Montpellier de la Société "Sereno, Camoin et Compagnie" mentionnée pourtant en 1876 ainsi qu'en 1881, année de sa transformation en société anonyme (4). Egalement peu de renseignements sur les fondateurs, au point qu'il semblerait que ces derniers se soient ingéniés à brouiller les pistes.

C'est tout le paradoxe d'un journal qui, en 68 ans de publication - à 100.000 exemplaires revendiqués par jour et répartis sur huit éditions (5) -, a façonné tant l'esprit de ses lecteurs et que celui de ses adversaires.

En reprenant l'enquête, nous n'ignorions rien de l'ampleur du projet qui nous attendait. Notre ambition a été est reste de pousser plus avant les pistes ouvertes par les travaux du professeur Andréani. Mais, fondant notre recherche sur l'aspect humain du sujet plus que sur celui de la presse, nos méthodes d'investigation ont par conséquent été un peu différentes pour un but similaire: cerner la réalité du "Petit Méridional" à travers ses principaux acteurs. Nous ne cacherons pas que les révélations des nouveaux éléments en notre possession ne nous permettent pas, à l'heure actuelle, de considérer le dossier comme clos. Au mieux, dans certains cas, nous en sommes encore réduits à formuler des hypothèses, que nos futures recherches confirmeront peut-être ou bien démentiront.

Il est tout d'abord nécessaire de revenir sur la création du journal, afin de donner plus de précision à ce sujet, au vu des documents que nous avons pu découvrir.


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